Métrique en Ligne
DLR_4/DLR377
Lucie DELARUE-MARDRUS
LA FIGURE DE PROUE
1908
BARBARESQUES
SIRÈNE
L’habitante des mers tièdes et sans marée 12
Qui cligne doucement des cils orientaux 12
Saura-t-elle abolir la voix désespérée 12
De celle assise au cœur de mes natives eaux ? 12
5 Ne le dis pas ! je sais que ta face est très pâle 12
Et si tristes tes yeux qu’ils ont pleuré la mer, 12
Certes point le bain bleu que nourrit ce ciel clair 12
Mais la mer rétractile et septentrionale, 12
La grise mer, ma glauque, où les couchants sont longs 12
10 Et violents parmi la détresse des brumes. 12
Et, jusque sur le bord, empourprent les écumes. 12
Comme d’avoir noyé tes cheveux roux et blonds. 12
Au plus chaud du soleil africain qui m’abuse, 12
Je sens jusqu’à mon cœur se glisser ton corps froid, 12
15 Translucide, et plus pâle et beau qu’une méduse. 12
Et tout le souvenir se colle contre moi. 12
Et c’est lorsqu’un grand cri perce les étendues 12
Et m’atteint, — moi qui sais tout le secret des mers. 12
Venu, non du port blanc d’où partent les steamers. 12
20 Mais du plus désolé de mes plages perdues… 12
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