Métrique en Ligne
DLR_4/DLR365
Lucie DELARUE-MARDRUS
LA FIGURE DE PROUE
1908
PREMIER ISLAM
RAMANDAN
Nous respirions la nuit de rose et de gingembre 12
Et les cires en pleurs des chandelles fondant, 12
Quand, nuageuse un peu parle vent de novembre, 12
Flottait, pleine, la lune, au ciel du Ramadan. 12
5 Nous aimions qu’insistât si fort une flûte aigre 12
Et les coups indécents du contretemps d’ici ; 12
Ombre portée au mur, nous aimions les deux nègres 12
Compositeurs, forgeant tout ce tapage-ci, 12
Karakouz, papillon de nuit, ombre chinoise 12
10 Se démenant au fond de son théâtre étroit. 12
Jetant autour de lui, selon ce qu’il dégoise. 12
Une profusion de rires ou d’effroi. 12
Guêpes, nous visitions la nuit de sucrerie, 12
Les gâteaux étagés où penche un œillet vrai. 12
15 L’Arabie en plis blancs nous regardait de près 12
Sans nous voir, les yeux longs et noirs de rêverie. 12
— Prononcez Orient, prononcez ce mot-ci, 12
Vous autres qui toujours pensez aux trois rois mages ! 12
Pour nous, de chair et d’os et d’aujourd’hui, voici 12
20 Que nous vivons dans Tordes très vieilles images. 12
La ville autour de nous poursuit sans rien savoir 12
Sa coutume. Elle boit, mange, prie et se farde. 12
Et nous sentons, perdus dans l'Islam et le soir. 12
Toute l’Europe au fond de nos yeux qui regarde. 12
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