Métrique en Ligne
DLR_2/DLR234
Lucie DELARUE-MARDRUS
FERVEUR
1902
REGARDS
MARCHE NORMANDE
Hors le présent heureux dont mon cœur est épris, 12
Lorsque je vois tomber les couchants équivoques 12
Dans la bénignité de ton fleuve, ô Paris ! 12
Il se réveille en moi, ‒ grouillants d'ours et de phoques, ‒ 12
5 D'agressifs, ancestraux et durs septentrions 12
Et des barques blessant la Seine de leurs coques. 12
Et je crie en mon cœur filial, nous crions 12
Vers tes mille quartiers, tes palais et tes arches, 12
Et préparons nos poings chargés de horions. 12
10 Le vent où chantent clair nos gutturales marches 12
Hérisse sur nos caps nos cheveux courts et roux, 12
Et nous espérons fort ensanglante tes marches, 12
Étant d'un terroir plein de ronces et de houx, 12
Où saignent largement les aubes boréales 12
15 Et dont les hommes sont brutaux comme des loups. 12
Et, si nous n'avons pas la dorure des hâles 12
Qu'on prend à la cuisson du soleil des Midis, 12
Des volontés de fer crispent nos faces pâles ; 12
C'est pourquoi tu mettras entre nos doigts hardis 12
20 La rançon qui fera retourner notre horde 12
A ses pays, croyance et rude paradis, 12
Car si nous t'admirons, ville qu'un fleuve borde, 12
Nous préférons encore à tes lourdes splendeurs, 12
Contents de son horreur et que son froid nous morde, 12
25 Notre neige fatale aux barbares blancheurs ! 12
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