Métrique en Ligne
DLR_2/DLR173
Lucie DELARUE-MARDRUS
FERVEUR
1902
L'ÂME DES CHOSES
L'ODEUR DE MON PAYS…
L'odeur de mon pays était dans une pomme. 12
Je l'ai mordue avec les yeux fermés du somme, 12
Pour me croire debout dans un herbage vert. 12
L'herbe haute sentait le soleil et la mer, 12
5 L'ombre des peupliers y allongeai des raies, 12
Et j'entendais le bruit des oiseaux, plein les haies, 12
Se mêler au retour des vagues de midi. 12
Je venais de hocher le pommier arrondi, 12
Et je m'inquiétais d'avoir laissé ouverte 12
10 Derrière moi, la porte au toit de chaume mou… 12
Combien de fois, ainsi, l'automne rousse et verte 12
Me vit-elle, au milieu du soleil et, debout, 12
Manger, les yeux fermés, la pomme rebondie 12
De tes prés, copieuse et forte Normandie ?… 12
15 Ah ! je ne guérirai jamais de mon pays ! 12
N'est-il pas la douceur des feuillages cueillis 12
Dans leur fraîcheur, la paix et toute l'innocence ? 12
Et qui donc a jamais guéri de son enfance ?… 12
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