Métrique en Ligne
DLR_2/DLR160
Lucie DELARUE-MARDRUS
FERVEUR
1902
POÈMES TERRESTRES
L'ADIEU AUX JARDINS
Aurais-je donc passé sans vous laisser de traces, 12
Après-midi profonds et calmes du printemps, 12
Où, la paume à la joue, accoudée aux terrasses, 12
J'ai si souvent fermé mes yeux las de beau temps ? 12
5 Dans ma pensée abstruse et mes songes de marbre, 12
J'ai tressailli parfois atteinte jusqu'aux os, 12
Les jours qu'interrompant le silence des arbres 12
Se gonflait tout à coup la voix de vos oiseaux, 12
Je mêlais ma jeunesse à la douceur des choses, 12
10 Quand le vent frissonnait dans les lilas voisins 12
Et qu'au soleil, ainsi que d'étranges raisins, 12
Vos marronniers fleuris portaient des grappes roses. 12
Leurs feuilles aux longs doigts qui s'étalent à plat 12
Flottaient sur l'air mouvant au rythme des berceuses ; 12
15 Un bourdon lourd au corps de pierre précieuse 12
mettait dans l'ombre verte une goutte d'éclat… 12
Ah ! terrasses ! jardins d'avril et de paresse, 12
Ne restera-t-il rien de moi parmi le vent ? 12
Que deviendront mes pas et mon rêve émouvant 12
20 Et ma tendresse, et ma tendresse, et ma tendresse ?… 12
logo du CRISCO logo de l'université