Métrique en Ligne
DLR_13/DLR1061
Lucie DELARUE-MARDRUS
CHOIX DE POÈMES
1951
CHAPITRE III
Chevauchées
Le beau Souhait
LES SEPT DOULEURS D'OCTOBRE, Ferenczi, 1930
Qu'on me donne un cheval rapide 8
Assez difficile à monter 8
Pour que mes yeux quittent le vide 8
Et mon rêve l'éternité. 8
5 Toute la force de mes jambes 8
Voudrait le furieux galop 8
Qui scande comme des ïambes 8
La plaine, le vent, le ciel, l'eau. 8
J'aurais, multipliant ma vie, 8
10 Deux élans, deux souffles, deux cœurs, 8
Et quatre sabots marteleurs 8
Pour bondir selon mon envie. 8
Je me souviens que je riais, 8
La tempête dans le visage, 8
15 Et que la crinière en biais 8
Fuyait dans le sens de l'orage. 8
Je me souviens de matins doux 8
Où je pénétrais d'un pas calme, 8
Lorsque l'été perdait sa palme 8
20 Et que les sentiers étaient roux. 8
Je me souviens du trot allègre 8
Que je prenais à travers bois, 8
Et du petit coup de vent aigre 8
Qui nous décoiffait à la fois. 8
25 Nous allions. La bête vivante 8
A mes songes obéissait. 8
Et, dans la brise gui l'évente, 8
Cette apparition passait. 8
Le cheval devenant moi-même, 8
30 Moi-même devenant cheval, 8
Centauresse à travers le val, 8
Fantôme du couchant suprême. 8
— Ah ! qu'on me rende ces chemins 8
Où tant aimait mon âme amère 8
35 Chevaucher sans fin sa chimère 8
Avec des crins vrais dans les mains ! 8
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