Métrique en Ligne
DLR_10/DLR921
Lucie DELARUE-MARDRUS
MORT ET PRINTEMPS
1932
PÂQUERETTES
Si les pâquerettes du soir, 8
Se copiant toutes entre elles, 8
Ferment leurs minuscules ailes 8
Pour dormir pendant qu'il fait noir, 8
5 Si, redressant leurs fraîches têtes 8
Aussitôt le jour revenu, 8
Se réveillant comme des bêtes 8
On leur revoit le cœur à nu, 8
C'est donc qu'elles ont quelque chose 8
10 De plus sensible qu'on ne croit. 8
C'est qu'elles ont un petit moi 8
Parmi leur collerette rose. 8
C'est que le monde végétal 8
Enraciné dans le silence 8
15 Sent comme nous, sans doute pense, 8
sans doute a son bien et son mal. 8
Que savons-nous des fleurs ? Peut-être 8
Que leur parole est leur parfum ? 8
Peut-être qu'elles sont quelqu'un 8
20 Qui nous voit dans l'ombre du hêtre ? 8
Naissant comme nous pour mourir, 8
Nous les imaginons inertes. 8
Et pourtant nous savons bien, certes, 8
Que vivre veut dire souffrir. 8
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