Métrique en Ligne
DLR_1/DLR127
Lucie DELARUE-MARDRUS
OCCIDENT
1901
VESPÉRALES
BELLE NUIT
La lune était aux cieux à l'heure de minuit 12
Comme une grande perle au front noir de la nuit. 12
Tout dormait et j'étais comme seule sur terre. 12
J'ai regardé la lune étrange et solitaire 12
5 Sur laquelle , Sapho, se sont fixés tes yeux 12
Aux temps antiques quand, de ton pas orgueilleux, 12
Tu hantais par les nuits l''île coloniale, 12
Toute seule, levant ta tête géniale 12
vers le ciel où mettait l'astre son pâle jour. 12
10 C'est alors qu'à ta lyre, ô Muse de l'amour ! 12
O Muse du désir et des folles tendresses, 12
Frissonnaient tes beaux doigts habiles aux caresses 12
Et que chantait parmi la marée et les vents 12
Ta bouche ivre aux baisers complexes et savants… 12
15 Oh ! de songer tout bas qu'à cette lune blême 12
Tes yeux s'étaient rivés, grande Sapho, de même 12
Que les miens quand, parmi le sommeil de la nuit, 12
Je veillais seule avec mon éternel ennui ! 12
Prêtresse de l'amour qu'ils appellent infâme, 12
20 O Sapho ! qu'a donc pu devenir ta grande âme ? 12
Sous la lune qui vit ta joie et ta douleur, 12
Je t'ai chantée, aimée, admirée en mon cœur, 12
Moi poétesse vierge, ô toi la poétesse 12
Courtisane, ô toi l'aigle orgueilleuse, l'Altesse ! 12
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