Métrique en Ligne
DLR_1/DLR1
Lucie DELARUE-MARDRUS
OCCIDENT
1901
EN PLEIN VENT
HYMNE PRINTANIER
Bonne nature, as-tu des baisers pour les lèvres ? 12
Des épaules pour les fronts lourds ? 8
Des fleurs pour la beauté ? des fraîcheurs pour les fièvres ? 12
Et, pour les membres restés gourds 8
5 De sortir de l'hiver aux froides fantaisies, 12
Ton printemps répand-il d'étirantes tiédeurs ? 12
As-tu des coins cachés pour les chagrins en pleurs ? 12
La narine béante avide d'ambroisies 12
Fleurera-t-elle en toi sa satisfaction ? 12
10 As-tu pour le rire et la joie 8
Des pourpres dont l'ampleur magnifique s'éploie, 12
Et des deuils pour l'affliction ? 8
Ces baisers, ces tiédeurs, ces fraîcheurs, ces corolles, 12
Ces recoins secrets pleins d'accueil, 8
15 Ces parfums aussi doux que de bonnes paroles 12
Et cette pourpre et ce grand deuil, 8
Si vraiment tu les as, Nature, ô maternelle, 12
Si ce n'est pas un songe, à moi donc tous ces biens ! 12
Le printemps tout entier gonfle mon cœur ; je viens 12
20 A ta coupe qu'emplit la jeunesse éternelle, 12
Et j'y veux étancher la soif que je ressens, 12
Et j'y veux, oubliant mes peines, 8
Sentir le renouveau m'envahir jusqu'aux veines 12
De grands espoirs adolescents. 8
25 Enveloppe ma joie avec de belles robes 12
Que sur moi développeront 8
Le rouge des couchants et le clair bleu des aubes ; 12
Voile ma douleur, si mon front 8
Persiste à conserver ses tristesses inertes, 12
30 Dans les grands crêpes noirs de tes nuits sans clartés. 12
Ah ! je m'enivrerai parmi les ombres vertes 12
Des grands arbres qui font, ainsi que des doigts gais, 12
Choir leur floraison sur les faces, 8
Et, comme des amis, je presserai leurs masses 12
35 Entre mes deux bras fatigués ! 8
Laisse-moi me coucher ainsi que joue à joue, 12
Calme comme à l'heure où l'on dort, 8
Dans l'herbe où des blancheurs d'ombelles font la roue, 12
Lourdes du poids d'un bourdon d'or ; 8
40 Laisse-moi respirer ton haleine champêtre 12
Où passe la douceur de quelque souffle humain ; 12
Laisse-moi me pencher, un bouquet à la main, 12
Sur tes étangs profonds où je ris d'apparaître, 12
Pour boire à plein gosier leur liquide cristal, 12
45 Tendre à tes sources mes deux paumes, 8
Écouter tous tes chants, goûter tous les arômes, 12
O Sève ! ô Printemps triomphal ! 8
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