XVII |
APRÈS LE COMBAT |
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Ce village là-bas c'est Frechwiller. |
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Ce village là-bas c'est Frechwiller. La nuit |
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Est arrivée, avec le repos qui la suit, |
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Couvrant d'ombres la plaine ou fut ce grand carnage |
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Qui pourrait rappeler les combats d'un autre âge, |
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Répandant au travers de ces champs désolés |
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Des cadavres humains partout amoncelés, |
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C'est navrant. |
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C'est navrant. Los soldats qu'a fauchés la mitraille |
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Sont tombés l'un sur l'autre, en ordre de bataille, |
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Sans bouger de leur poste au suprême moment : |
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Auprès d'un régiment un autre régiment, |
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Près du général mort l'officier impassible ; |
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Et tous, fusil au poing, le front encor terrible, |
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N'ayant pas à la mort hésité de s'offrir, |
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Tels qu'ils avaient lutté se sont laissés mourir. |
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Çà et là des canons encloués sur la terre, |
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Tordant leur affût noir étonné de se taire ; |
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Plus loin des chevaux morts, le poitrail rouge encor, |
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Partout le sang, partout le deuil, partout la mort ! |
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Avançons : le massacre en tous lieux se ressemble. |
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Ici des grenadiers au panache qui tremble, |
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Là des soldats de ligne et des turcos couchés, |
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Rencontrés par la mort qui les avaient cherchés : |
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Nul n'a plié devant la trombe meurtrière ; |
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Pas de fuyards : aucun n'a regardé derrière ! |
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Et sur ces morts qu'a faits la volonté d'un seul, |
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Le silence des nuits jeté comme un linceul. |
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Oh ! qui pourrait savoir, oh ! qui pourrait connaître |
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Les bonheurs à venir qui dorment là peut-être ! |
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Qui dirait ce que Dieu gardait à ces soldats |
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Que deux tyrans maudits ont immolés là-bas, |
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Pour leur ambition qui réclamait ses proies ! |
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Qui dirait ce que Dieu leur réservait de joies ! |
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Qui dirait l'avenir qui les attendait tous ! |
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A celui-ci, l'enfant qu'on tient sur ses genoux |
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Et qui paie un baiser d'une douce caresse ; |
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A celui-là l'amour béni d'une maîtresse, |
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A cet autre qui dort pour ne plus s'éveiller, |
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La gloire que sa mort n'a même pu payer ! |
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. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . |
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Dijon, 20 août.
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