Métrique en Ligne
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Marceline DESBORDES-VALMORE
POÉSIES INÉDITES
1860
AMOUR
LA FEUILLE VOLÉE
Va-t-il écrire a sa maîtresse 8
L’oiseau vainqueur, le moineau franc, 8
Sur ce larcin que son bec presse, 8
Sur ce lambeau de vélin blanc ? 8
5 Il me l’a pris. J’allais moi-même. 8
Trempé de pardon et d’espoir, 8
L’envoyer à l’absent que j’aime, 8
Et l’appeler… s’il veut me voir. 8
Souffle hardi qui viens de naître 8
10 Parmi les souffles de l’été, 8
Je t’avais ouvert ma fenêtre, 8
Et tu voles ma pauvreté ! 8
Oiseau, le fragment d’une page 8
Peut contenir tant de bonheur ! 8
15 Ah ! si tu le sais, sois mon page. 8
Et ne t’en va pas sans mon cœur. 8
Ce cœur, souvent, révèle à peine 8
Le trouble enfermé de mon sort ; 8
Ma voix ardente est sans haleine ; 8
20 Mon âme en pleurs est sans essor ; 8
Et tes ailes me font envie, 8
Quand ta volonté frappe l’air. 8
Ton cri rapide est une vie ! 8
Ton vol, un éloquent éclair ! 8
25 Ô flèche amoureuse lancée, 8
Aussi prompte que ton désir, 8
L’objet de ta fuite empressée, 8
Dieu ! que tu dois bien le saisir ! 8
Toi chez qui le printemps allume 8
30 L’audace et l’élan de l’amour, 8
Remets ce papier sous ma plume 8
Puisqu’il va promettre un beau jour. 8
Mais tu t’enfuis, charmante chose. 8
En me regardant de travers ; 8
35 Car tu hais la cellule close, 8
Toi dont la cage est l’univers 8
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