Métrique en Ligne
DES_3/DES310
Marceline DESBORDES-VALMORE
BOUQUETS ET PRIÈRES
1843
L'ÉGLISE D'ARONA
(ITALIE)
On est moins seul au fond d'une église déserte, 12
De son père inquiet c'est la porte entr'ouverte ; 12
Lui qui bénit l'enfant, même après son départ ; 12
Lui, qui ne dit jamais : « N'entrez plus, c'est trop tard ! » 12
5 Moi, j'ai tardé, Seigneur, j'ai fui votre colère-, 12
Comme l'enfant qui tremble à la voix de son père, 12
Se dérobe au jardin tout pâle, tout en pleurs, 12
Retient son souffle et met sa tête dans les fleurs ; 12
J'ai tardé ! Retenant le souffle de ma plainte, 12
10 J'ai levé mes deux mains entre vous et ma crainte ; 12
J'ai fait la morte ; et puis, en fermant bien les yeux, 12
Me croyant invisible aux lumières des cieux, 12
Triste comme à ténèbre au milieu de mon âme, 12
Je fuyais. Mais, Seigneur ! votre incessante flamme, 12
15 Perçait de mes détours les fragiles remparts, 12
Et dans mon cœur fermé rentrait, de toutes parts ! 12
C'est là que j'ai senti, de sa fuite lassée, 12
Se retourner vers vous mon âme délaissée ; 12
Et me voilà pareille à ce volage enfant, 12
20 Dépouillé par la ville, et qui n'a bien souvent, 12
Que ses débiles mains pour voiler son visage, 12
Quand il dit à son père : Oh ! que n'ai-je été sage ! 12
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