Métrique en Ligne
DES_3/DES294
Marceline DESBORDES-VALMORE
BOUQUETS ET PRIÈRES
1843
MOI JE LE SAIS
À mademoiselle Louise Grombach.
Vous le saurez, la vie a des abîmes 10
Cachés au loin sous d'innombrables fleurs : 10
Les rossignols qui chantent à leurs cimes, 10
Où chantent-ils dans la saison des pleurs ? 10
5 Vous le saurez, la vie a des abîmes 10
Cachés au loin sous d'innombrables fleurs. 10
Oui, la jeunesse est le pays des larmes ; 10
Moi je le sais : j'en viens. Je pleure encor, 10
Le front vibrant de ses feux, de ses charmes ; 10
10 Le cœur brisé de son dernier accord ! 10
Oui, la jeunesse est le pays des larmes. 10
Moi je le sais : j'en viens. Je pleure encor ! 10
Lorsqu'on finit d'être jeune, on s'arrête ; 10
À tant de jours on veut reprendre un jour : 10
15 Ils sont partis et l'on penche sa tête. 10
D'un tel voyage à quand donc le retour ? 10
Lorsqu'on finit d'être jeune, on s'arrête ; 10
À tant de jours on veut reprendre un jour ! 10
Souffrant tout bas de ses mille blessures, 10
20 On croit mourir : voyez, on ne meurt pas. 10
De tous serpens Dieu guérit les morsures, 10
Et le dictame est semé sous nos pas. 10
Souffrant tout bas de ses mille blessures, 10
On croit mourir : on plie, on ne meurt pas ! 10
25 Rappelez-vous ce chant d'une glaneuse, 10
Qui s'arrêta pour serrer votre main ; 10
Et si du sort l'étoile lumineuse, 10
Vous mûrit mieux les épis du chemin, 10
Rappelez-vous ce chant d'une glaneuse, 10
30 Qui s'arrêta pour serrer votre main ! 10
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