AUX PETITS ENFANTS |
LE CONVOI D’UN ANGE |
À MA MÈRE QUI N’EST PLUS |
L’esprit céleste, ému d’une sainte tristesse,
Consulte, l’œil aux cieux, l’éternelle sagesse ;
Le Tout-Puissant fait signe, et, d’un facile effort,
Soulevant dans ses bras l’innocent qui sommeille,
Il presse sa paupière et sa lèvre vermeille :
« Sois heureux ! » lui dit-il ; et l’enfant était mort.
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Ch. Loyson. |
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Mon Dieu ! ce que j’entends si suave en moi-même, |
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Qui s’éveille, qui chante au milieu démon cœur, |
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Sonore tremblement qui m’attriste et que j’aime, |
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Est-ce un timbre dans l’âme ? Est-ce un oiseau moqueur, |
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Qui fait ces voix d’enfant autre part entendues, |
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Douces voix que la terre a pour jamais perdues ? |
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Dieu ! Quel écho profond pour de si faibles voix ! |
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Quand j’ignorais la mort, je pense qu’une fois |
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On me fit blanche et belle, et qu’on serra ma tête |
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D’une tresse de fleurs comme pour une fête ; |
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Qu’une gaze tombait sur mes souliers plus beaux ; |
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Et qu’à travers le jour nous portions des flambeaux : |
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Et puis, qu’un long ruban nous tenait, jeunes filles |
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Prises pour le cortège au sein de nos familles. |
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Oui, de mes jours pleurés je vois sortir ce jour |
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Tout soleil ! ruisselant sur la fraîche chapelle |
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Où je voudrais prier quand je me la rappelle. |
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Enfants, nous emportions à son dernier séjour |
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Un enfant plus léger, plus peureux de la terre, |
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Et qui s’en retournait habillé de mystère, |
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Furtif comme l’oiseau sur nos toits entrevu, |
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Posé pour nous chanter son passage imprévu, |
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Dont la flèche invisible a détendu les ailes, |
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Et qui se traîne aux fleurs, et disparaît sous elles ! |
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Je souriais pourtant, car je ne savais pas |
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Si l’église tintait la vie ou le trépas. |
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Ma mère était plus tendre et me pressait contre elle. |
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« Dieu ! disait-elle, ô Dieu ! cachez-la dans votre aile ! » |
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Et puis en me baisant : « Tu laisseras tomber |
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Tes fleurs en saluant l’autel de la Madone ; |
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Dans l’eau sainte, petite, il faut les imbiber ; |
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Mets ton flambeau dans l’ombre ; elle sait bien qui donne. |
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Regarde si la flamme a monté vers les cieux, |
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Ma fille ; et ne va pas en détourner les yeux ! |
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Tiens, voilà pour le pauvre : il faut l’aider ; il prie |
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Celle qui va te voir et qu’on nomme Marie. » |
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Émue elle ajouta : « Toi, tu vivras toujours ! » |
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Et je trouvai ce jour plus beau que d’autres jours. |
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Bel âge somnambule ! Enchanté d’ignorance, |
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Qui ne sait pas qu’on meurt, et qui vit d’espérance ! |
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Qui croit que le malheur est pour le méchant… Mais, |
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Où. sont-ils les méchants ? En a-t-on vu jamais ? |
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Ô tissu d’harmonie ! Ô premières années, |
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Où les âmes sans peur s’envolent pardonnées, |
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Où pas un chant n’est faux, pas un écho défait, |
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Où chaque bruit nouveau frappe un accord parfait ! |
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Nous entrâmes sans bruit dans la chapelle ouverte, |
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Étrangère au soleil sous sa coupole verte ; |
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Là, comme une eau qui coule au milieu de l’été, |
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On entendait tout bas courir l’éternité. |
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Quelque chose de tendre y languissait : du lierre |
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Y tenait doucement la vierge prisonnière ; |
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Parmi le jour douteux qui flottait dans le chœur, |
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On voyait s’abaisser et s’élever son cœur. |
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Je le croirai toujours : c’était comme une femme |
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Sur ses genoux émus tenant son premier-né, |
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Chaste et nu, doux et fort, humble et prédestiné, |
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Déjà si plein d’amour qu’il nous attirait l’âme ! |
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La mort passait sans pleurs. Hélas ! on n’avait pu |
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Porter la mère au seuil où la blanche volée, |
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Sur la petite boîte odorante et voilée, |
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Reprenait l’hymne frêle aux vents interrompu. |
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Et le deuil n’était pas dans notre frais cortège ; |
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Car le prêtre avait dit : « Enfant, Dieu te protège ; |
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Dieu t’enlève au banquet mortel qui t’appelait, |
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Encor gonflé pour toi de larmes et de lait ! » |
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Et quand je ne vis plus ce doux fardeau de roses |
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Trembler au fond du voile au soleil étendu, |
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On dit : « Regarde au ciel ! » Et je vis tant de choses |
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Que je l’y crus porté parle vent, ou perdu, |
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Fait ange dans l’azur inondé de lumière ; |
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Car l’or du ciel fondait en fils étincelants, |
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Et tant de jour coulait sur nos vêtements blancs, |
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Qu’il fallut curieuse en ôter ma paupière. |
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Longtemps tout fut mobile et rouge sous ma main, |
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Et je ne pus compter les arbres du chemin. |
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Sous le toit sans bonheur on nous reçut encore ; |
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Le jardin nous offrit ce que l’enfance adore, |
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Et nous trouvâmes bons les fruits de l’ange. Hélas ! |
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Une chambre était triste : elle ne s’ouvrit pas ; |
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Et nous fîmes un feu des églantines mortes, |
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Dont l’enfant qui s’en va fait arroser les portes. |
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L’enfant aimé de Dieu n’est jamais revenu ; |
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Sage, il trouva son nid assez grand pour sa tombe. |
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Oui, vous l’aimiez, mon Dieu ! car la jeune colombe |
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N’emporta point de terre à son pied rose et nu ! |
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