L’ÂME DE PAGANINI |
On dirait sous sa corde et sans frein et sans règle
Un nid de rossignols couvé par des yeux d’aigle.
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Prosper Valmore. |
Doux comme le soupir de l’enfant qui sommeille,
Un son vague et plaintif se répand dans les airs.
Est-ce un écho du ciel qui charme notre oreille ?
Est-ce un soupir d’amour de la terre et des mers ?
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Jamais aucune main sur la corde sonore
Ne guida dans ses jeux sa main novice encore.
L’homme n’enseigne pas ce qu’inspire le ciel ;
Le ruisseau n’apprend pas à couler dans sa pente,
L’aigle à fendre les airs d’une aile indépendante,
L’abeille à composer son miel.
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Alphonse de Lamartine. |
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Oui, d’une flamme à part cette âme fut formée ! |
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Oui, Dieu la soupira, ce fut sa bien-aimée ! |
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Oui, mille oiseaux d’amour murmurent dans son sein ; |
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Leur souffle le parcourt, ils chantent sous sa main ; |
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Lorsqu’on entend glisser sa vie |
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Aux cordes où son cœur dit ses pulsations, |
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Doux nom ! tu vas tintant d’allégresse et d’envie |
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Autour de ses créations ! |
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Lorsqu’il va les cueillir comme les fleurs aux plaines, |
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Imitant la cigale à travers le bouleau, |
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Ou le frissonnement des nocturnes phalènes |
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Frôlant le narcisse dans l’eau ; |
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Lorsque sa gloire solitaire, |
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Au milieu du monde attentif, |
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Force tous les bruits à se taire, |
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Pour écouter le dieu plaintif ; |
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Lorsqu’il monte, léger comme un rêve dans l’ombre, |
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Qu’il attache à ses doigts les ailes d’un oiseau, |
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Et se balance ainsi que le rossignol sombre |
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Désaltérant sa voix au sommet d’un roseau ; |
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Parmi ses suaves haleines |
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Qui bruissent comme les fleurs, |
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Roule un miel dans toutes les peines, |
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Et des larmes pour tous les pleurs ! |
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Un roi qui plaint et qui pardonne |
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Relève moins d’infortunés : |
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Pensif et seul sous sa couronne, |
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Roi sans armée, il donne ! il donne |
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Tous les biens qui lui sont donnés ! |
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Attiré dans sa pitié tendre, |
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On ne sait plus rien des méchants ; |
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En est-il où l’on peut l’entendre ? |
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Non, le mal est forcé d’attendre |
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Que son âme enferme ses chants ! |
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Il porte au malheur qui succombe |
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Un secret qu’il va prendre au ciel, |
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Et relevant la foi qui tombe, |
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Qui doute et qui cherchait la tombe, |
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Il dit : « L’espoir est immortel ! » |
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À cette âme qu’il a cherchée, |
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Il dit : « Ma sœur, écoute-moi : |
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Je parle à la douleur cachée ; |
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Dans la. mienne au monde attachée |
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Je souffre !… et j’attends comme toi. » |
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Car, on dit que naguère un cœur de jeune femme, |
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À force de l’aimer, mourut ! et s’enferma |
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Sous l’érable sonore où palpite sa flamme, |
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Pour répondre toujours à celui qu’elle aima ! |
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C’est sur ce cœur voilé qu’il frappe ses prodiges, |
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Et ses sanglots d’amour, et sa prière aux cieux, |
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Et tous ses cris délicieux ! |
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Ils sont deux ! toujours deux au fond de leurs prestiges : |
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Elle ! à lui demander de toujours la chérir, |
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À lui reprocher, lui ! d’avoir voulu mourir. |
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Oh ! comme ils s’isolent ensemble |
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Pour causer de ciel et d’amour ! |
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L’heure sans nom qui les rassemble |
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N’a plus de nuit, n’a plus de jour. |
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Leur chaste et brûlante souffrance |
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S’abreuve en tremblant d’espérance ; |
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Car, dans un profond souvenir, |
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Que de croyance et d’avenir ! |
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Mais quand il faut enfin retomber sur la terre, |
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Recueilli tout entier dans son double mystère, |
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Savourant pour sa soif encore un peu de miel, |
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Avant d’abandonner le ciel, |
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Son génie altéré s’y plonge et s’y replonge, |
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Comme un baiser qui se prolonge |
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S’attache à des lèvres de feu, |
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Pour suspendre longtemps un impossible adieu ! |
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Voilà pourquoi son front d’artiste |
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S’empreint de charme et de pâleur, |
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Et pourquoi l’on écoute, triste, |
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Ce talent baigné de douleur ! |
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Dieu ! protégez dans ses voyages |
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L’écho vivant de votre voix, |
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Qui suspend la voix des orages, |
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Ou les fait gémir sous ses doigts. |
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À cette errante mélodie |
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Fermez les sentiers douloureux ; |
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Car sa sublime maladie |
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Guérit bien des cœurs malheureux ! |
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