ÉLÉGIES |
ÉLÉGIE |
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Ma sœur, il est parti ! ma sœur, il m’abandonne ! |
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Je sais qu’il m’abandonne, et j’attends, et je meurs, |
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Je meurs. Embrasse-moi, pleure pour moi… pardonne… |
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Je n’ai pas une larme, et j’ai besoin de pleurs. |
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Tu gémis ? Que je t’aime ! Oh ! jamais le sourire |
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Ne te rendit plus belle aux plus beaux de nos jours. |
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Tourne vers moi les yeux, si tu plains mon délire ; |
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Si tes yeux ont des pleurs, regarde-moi toujours. |
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Mais retiens tes sanglots. Il m’appelle, il me touche, |
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Son souffle en me cherchant vient d’effleurer ma bouche. |
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Laisse, tandis qu’il brûle et passe autour de nous, |
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Laisse-moi reposer mon front sur tes genoux. |
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Écoute ! ici, ce soir, à moi-même cachée, |
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Je ne sais quelle force attirait mon ennui : |
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Ce n’était plus son ombre à mes pas attachée, |
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Oh ! ma sœur, c’était lui ! |
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C’était lui, mais changé, mais triste. Sa voix tendre |
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Avait pris des accents inconnus aux mortels, |
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Plus ravissants, plus purs, comme on croit les entendre |
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Quand on rêve des cieux aux pieds des saints autels. |
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Il parlait, et ma vie était près de s’éteindre. |
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L’étonnement, l’effroi, ce doux effroi du cœur, |
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M’enchaînait devant lui. Je l’écoutais se plaindre, |
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Et, mourante pour lui, je plaignais mon vainqueur… |
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Il parlait, il rendait la nature attentive ; |
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Tout se taisait. Des vents l’haleine était captive ; |
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Du rossignol ému le chant semblait mourir ; |
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On eût dit que l’eau même oubliait de courir. |
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Hélas ! qu’avait-il fait alors pour me déplaire ? |
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Il gémissait, me cherchait comme toi. |
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Non, je n’avais plus de colère, |
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Il n’était plus coupable, il était devant moi. |
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Sais-tu ce qu’il m’a dit ? des reproches… des larmes… |
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Il sait pleurer, ma sœur ! |
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Ô Dieu ! que sur son front la tristesse a de charmes ! |
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Que j’aimais de ses yeux la brûlante douceur ! |
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Sa plainte m’accusait ; le crime… je l’ignore : |
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J’ai fait pour l’expliquer des efforts superflus. |
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Ces mots seuls m’ont frappée, il me les crie encore : |
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« Je ne te verrai plus ! » |
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Et je l’ai laissé fuir, et ma langue glacée |
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A murmuré son nom qu’il n’a pas entendu ; |
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Et sans saisir sa main ma main s’est avancée, |
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Et mon dernier adieu dans les airs s’est perdu. |
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