Métrique en Ligne
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Marceline DESBORDES-VALMORE
POÉSIES
1830
IDYLLES
L’ADIEU DU SOIR
Dieu ! qu’il est tard ! quelle surprise ! 8
Le temps a fui comme un éclair ; 8
Douze fois l’heure a frappé l’air, 8
Et près de toi je suis encore assise ! 10
5 Et loin de pressentir le moment du sommeil, 12
Je croyais voir encore un rayon de soleil ! 12
Se peut-il que déjà l’oiseau dorme au bocage ! 12
Ah ! pour dormir il fait si beau ! 8
Les étoiles en feu brillent dans le ruisseau, 12
10 Et le ciel n’a pas un nuage ; 8
On dirait que c’est pour l’Amour 8
Qu’une si belle nuit a remplacé le jour ! 12
Mais, il le faut, regagne ta chaumière ; 10
Garde-toi d’éveiller notre chien endormi, 12
15 Il méconnaîtrait son ami, 8
Et de mon imprudence il instruirait ma mère. 12
Tu ne me réponds pas ; tu détournes les yeux ! 12
Hélas ! tu veux en vain me cacher ta tristesse ; 12
Tout ce qui manque à ta tendresse, 8
20 Ne manque-t-il pas à mes vœux ? 8
De te quitter donne-moi le courage ; 10
Écoute la raison, va-t-en. Laisse ma main ! 12
Il est minuit ; tout repose au village, 10
Et nous voilà presqu’à demain ! 8
25 Écoute ! si le soir nous cause un mal extrême, 12
Bientôt le jour saura nous réunir, 10
Et le bonheur du souvenir 8
Va se confondre encore avec le bonheur même. 12
Mais, je le sens, j’ai beau compter sur ton retour, 12
30 En te disant adieu chaque soir je soupire ; 12
Ah ! puissions-nous bientôt désapprendre à le dire ! 12
Ce mot, ce triste mot n’est pas fait pour l’amour. 12
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