Métrique en Ligne
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Tristan DERÈME
LA VERDURE DORÉE
1922
CXXXII
A Fagus.
Viendras-tu rallumer les lampes 8
Et ma vie, Amour que j'attends ? 8
J'ai des cheveux gris sur les tempes 8
Et je n'ai pas encor trente ans. 8
5 Hôtels garnis, chambres meublées, 8
Escaliers tristes, quels décors ! 8
Ah ! princesses ensorcelées, 8
Lys ténébreux dans les allées, 8
Vasques de jaspe et chœurs de cors ! 8
10 Où est l'amour dont je renaisse 8
Et qui me rende ma jeunesse ? 8
Émail fendu du lavabo 8
Où saucèrent tant de visages 8
Disparus ; sont-ils au tombeau 8
15 Ou rient-ils à des paysages ? 8
Amer poison des logements 8
Dont mourraient seize Mithridates ; 8
Miroir terne où les diamants 8
De problématiques amants 8
20 Gravèrent des noms et des dates. 8
Ils sont partis. Ils sont ailleurs. 8
Les jours passés sont les meilleurs. 8
Chambres désertes et cruelles 8
Où j'erre avec mon encrier ; 8
25 Des buveurs braillent aux ruelles ; 8
À quoi bon gémir et crier ? 8
Qui veut trop chanter, il s'enroue ; 8
Et par les vitres de l'hôtel 8
Ne vois-tu pas la Grande Roue 8
30 Et ces beaux nuages que troue 8
Et déchire la tour Eiffel ? 8
Ton cœur, n'est-ce un de ces nuages, 8
Ton cœur, après tant de voyages ? 8
Chambres d'hôtel, amours d'un jour, 8
35 De six mois ou de quatre années, 8
Ce sont des roses mortes pour 8
De futures roses fanées. 8
Rêves ternis, bannis, finis, 8
Se peut-il que tu te rallumes, 8
40 Espoir ? Amours, hôtels garnis, 8
Les cœurs s'en vont de nids en nids 8
Perdant leurs larmes et leurs plumes. 8
La lune monte, seule aussi, 8
Image et fleur de mon souci. 8
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