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DAU_1/DAU12
Alphonse DAUDET
LES AMOUREUSES
POEMES ET FANTAISIES
1858
LES AMOUREUSES
MISERERE DE L’AMOUR
Miserere ! 4
Encore une fois, ma colombe, 8
O mon beau trésor adoré, 8
Viens t’agenouiller sur la tombe 8
5 Où notre amour est enterré. 8
Miserere ! 4
I
Il est là dans sa robe blanche ; 8
Qu’il est chaste et qu’il est joli ! 8
Il dort, ce cher enseveli, 8
10 Et comme un fruit mûr sur la branche, 8
Son jeune front, son front pâli 8
Incline à terre, et penche, penche… 8
Miserere ! 4
Regarde-le bien, ma colombe, 8
15 O mon beau trésor adoré, 8
Il est là couché dans la tombe, 8
Comme nous l’avons enterré, 8
Miserere ! 4
II
Depuis les pieds jusqu’à la tête, 8
20 Sans regret, comme sans remord, 8
Nous l’avions fait beau pour la mort. 8
Ce fut sa dernière toilette ; 8
Nous ne pleurâmes pas bien fort, 8
Vous étiez femme et moi poète. 8
25 Miserere ! 4
Les temps ont changé, ma colombe, 8
O mon beau trésor adoré, 8
Nous venons pleurer sur sa tombe, 8
Maintenant qu’il est enterré. 8
30 Miserere ! 4
III
Il est mort, la dernière automne ; 8
C’est au printemps qu’il était né. 8
Les médecins l’ont condamné 8
Comme trop pur, trop monotone : 8
35 Mon cœur leur avait pardonné… 8
Je ne sais plus s’il leur pardonne. 8
Miserere ! 4
Ah ! je le crains bien, ma colombe, 8
O mon beau trésor adoré, 8
40 Trop tôt nous avons fait sa tombe, 8
Trop tôt nous l’avons enterré. 8
Miserere ! 4
IV
Il est des graines de rechange 8
Pour tout amoureux chapelet. 8
45 Nous pourrions, encor, s’il voulait, 8
Le ressusciter, ce cher ange. 8
Mais non ! il est là comme il est ; 8
Je ne veux pas qu’on le dérange. 8
Miserere ! 4
50 Par pitié, fermez cette tombe ; 8
Jamais je n’avais tant pleuré ! 8
Oh ! dites pourquoi, ma colombe, 8
L’avons-nous si bien enterré ? 8
Miserere ! 4
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