Métrique en Ligne
CRO_1/CRO8
Charles CROS
Le Coffret De Santal
1879
CHANSONS PERPÉTUELLES
La Dame en pierre
A Catulle Mendés
Sur ce couvercle de tombeau 8
Elle dort. L'obscur artiste 7
Qui l'a sculptée a vu le beau 8
Sans rien de triste. 4
5 Joignant les mains, les yeux heureux 8
Sous le voile des paupières, 7
Elle a des rêves amoureux 8
Dans ses prières. 4
Sous les plis lourds du vêtement, 8
10 La chair apparaît rebelle, 7
N'oubliant pas complètement 8
Qu'elle était belle. 4
Ramenés sur le sein glacé 8
Les bras, en d'étroites manches, 7
15 Rêvent l'amant qu'ont enlacé 8
Leurs chaînes blanches. 4
Le lévrier, comme autrefois 8
Attendant une caresse, 7
Dort blotti contre les pieds froids 8
20 De sa maîtresse. 4
Tout le passé revit. Je vois 8
Les splendeurs seigneuriales, 7
Les écussons et les pavois 8
Des grandes salles, 4
25 Les hauts plafonds de bois, bordés 8
D'emblématiques sculptures, 7
Les chasses, les tournois brodés 8
Sur les tentures. 4
Dans son fauteuil, sans nul souci 8
30 Des gens dont la chambre est pleine, 7
A quoi peut donc rêver ainsi, 8
La châtelaine ? 4
Ses yeux où brillent par moment 8
Les fiertés intérieures, 7
35 Lisent mélancoliquement 8
Un livre d'heures. 4
Quand une femme rêve ainsi 8
Fière de sa beauté rare, 7
C'est quelque drame sans merci 8
40 Qui se prépare. 4
Peut-être à temps, en pleine fleur, 8
Celle-ci fut mise en terre. 7
Bien qu'implacable, la douleur 8
En fut austère. 4
45 L'amant n'a pas vu se ternir, 8
Au souffle de l'infidèle, 7
La pureté du souvenir 8
Qu'il avait d'elle. 4
La mort n'a pas atteint le beau. 8
50 La chair perverse est tuée, 7
Mais la forme est, sur un tombeau, 8
Perpétuée. 4
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