Métrique en Ligne
COP_7/COP198
François COPPÉE
LE RELIQUAIRE
1866
LA VAGUE ET LA CLOCHE
Une fois, terrassé par un puissant breuvage, 12
J'ai rêvé que parmi les vagues et le bruit 12
De la mer je voguais sans fanal dans la nuit, 12
Morne rameur, n'ayant plus l'espoir du rivage. 12
5 L'Océan me crachait ses baves sur le front 12
Et le vent me glaçait d'horreur jusqu'aux entrailles ; 12
Les lames s'écroulaient ainsi que des murailles, 12
Avec ce rythme lent qu'un silence interrompt. 12
Puis tout changea. La mer et sa noire mêlée 12
10 Sombrèrent. Sous mes pieds s'effondra le plancher 12
De la barque… Et j'étais seul dans un vieux clocher, 12
Chevauchant avec rage une cloche ébranlée. 12
J'étreignais la criarde opiniâtrement, 12
Convulsif, et fermant dans l'effort mes paupières ; 12
15 Le grondement faisait trembler les vieilles pierres, 12
Tant j'activais sans fin le lourd balancement. 12
Pourquoi n'as-tu point dit, ô rêve ! où Dieu nous mène ? 12
Pourquoi n'as-tu point dit s'ils ne finiraient pas, 12
L'inutile travail et l'éternel fracas 12
20 Dont est faite la vie, hélas ! la vie humaine ? 12
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