Métrique en Ligne
COP_4/COP89
François COPPÉE
LES HUMBLES
1872
Simple Ambition
Être un modeste croque-notes 8
Donnant des leçons de hasard, 8
Qui court Paris en grosses bottes, 8
Mais qui comprend Gluck et Mozart ; 8
5 Avoir quelque part un vieux maitre ; 8
Aimer sa fille ; et, chaque soir, 8
Brosser son vieil habit et mettre 8
Du linge pour aller les voir ; 8
Ils logent loin ! Faire une lieue 8
10 En chantonnant quelques vieux airs, 8
L'été sous la douce nuit bleue 8
Et par les bons quartiers déserts ; 8
Aimer d’un amour très-honnête ; 8
Avoir peur, en portant la main 8
15 A certain cordon de sonnette 8
Dont on sait pourtant le chemin- 8
— Ah ! monsieur Paul ! — Mademoiselle ! 8
— Mon père vous attend. Voyez. 8
Voici votre violoncelle, 8
20 Son violon et les cahiers. 8
Demander comment va le maître, 8
Qui survient, simple et cordial ; 8
Oh ! le bon moment ! — La fenêtre 8
S’ouvre sur le ciel nuptial ; 8
25 Les brises déjà rafraichies 8
Entrent avec des papillons 8
Bien vite brûlés aux bougies 8
Qui jettent de faibles rayons. 8
Le concert commence. Elle écoute, 8
30 Blonde, accoudée et tout en blanc, 8
Et son cœur frissonne sans doute 8
Avec l’allegretto tremblant. 8
Puis, c’est le menuet, l’andante, 8
Tout le beau poëme du bruit, 8
35 Toute la symphonie ardente. 8
Et le temps passe. Il est minuit. 8
— Sauvez-vous. C’est une heure indue 8
Pour vous qui logez tout là-bas ; 8
Et cette banlieue est perdue. 8
40 Vous viendrez demain, n’est-ce pas ? 8
Mais avant de partir, encore 8
Un peu de musique ; pas trop — 8
Pendant que Julie élabore 8
Trois humbles verres de sirop. 8
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