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Ainsi donc le destin, dans les murs de Salante, |
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Fixe pour un moment ta fortune flottante ! |
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Tu triomphes, ingrat ; et ta crédulité |
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S’est de tous tes forfaits promis l’impunité ! |
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Que sais-je ? en ce moment ta coupable imprudence |
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Peut-être ose accuser ma haine d’impuissance. |
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Je veux avec le jour t’arracher ton erreur ; |
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Par mon amour passé juge de ma fureur. |
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Non, tu ne verras point cette Itaque chérie, |
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Ce séjour que je hais, cette obscure patrie, |
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Pour qui ton cœur jadis, d’un vain espoir flatté, |
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Méprisa mon amour et l’immortalité. |
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Grands Dieux ! si vos décrets permettent qu’il la voie, |
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Puisse-t-il ne goûter qu’une trompeuse joie ! |
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Oui, traître, qu’aussitôt un nuage odieux, |
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Abusant ton espoir, la dérobe à tes yeux ; |
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Qu’à te persécuter la fortune constante, |
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Promène sur les mers ta destinée errante ; |
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Que les vents, échappés de leurs sombres cachots, |
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De la mer contre toi soulèvent tous les flots ; |
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Et, pour combler mes vœux, qu’un funeste naufrage |
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M’offre ton corps mourant poussé vers mon rivage ; |
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Que ta nymphe, en pleurant sur ton malheureux sort, |
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Par ses cris douloureux appelle en vain la mort ! |
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Dieux ? quel plaisir de voir ma rivale plaintive |
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Rappeler vainement ton ombre fugitive ! |
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Mes yeux, au lieu des tiens, jouiront de ses pleurs, |
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Et ma présence encor aigrira ses douleurs. |
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Sans me déplaire alors, de cyprès couronnée, |
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Elle pourra gémir à tes pieds prosternée ; |
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Et je n’envîrai plus ni ses gémissemens, |
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Ni ses tendres regards, ni ses embrassemens. |
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Mais je frémis, mon cœur, mon faible cœur soupire : |
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Dieux ! serait-ce d’amour ?… Ah ! ma fureur expire ! |
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Malheureuse ! je l’aime et le hais tour à tour. |
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Que dis-je ? cette haine est un transport d’amour. |
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Télémaque ! je cède ; oui, c’est ma destinée ; |
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Sous le joug de l’Amour ma haine est enchaînée ; |
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N’en crois pas les transports où j’ai pu me livrer ; |
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Ne crains rien : Calypso ne peut que t’adorer. |
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Grands dieux ! n’exaucez pas ma funeste prière ; |
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C’était contre moi-même armer votre colère. |
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Quand mon cœur pour l’ingrat tremble au moindre danger, |
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Hélas ! que je suis loin de vouloir me venger ! |
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Quelle était ma fureur ? Oui, dieux ! je vous implore : |
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Mais ce n’est qu’en faveur de l’objet que j’adore ; |
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Et s’il faut éprouver sur lui votre pouvoir, |
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Consultez mon amour et non mon désespoir. |
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Mais, hélas ! que dis-tu ; malheureuse déesse ? |
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Arrête ; où t’emportait une indigne faiblesse ? |
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Songes-tu que le traître, au mépris de ta foi, |
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Ose former des vœux qui ne sont pas pour toi ? |
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Oui, tandis que pour lui, lâchement suppliante, |
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Je fais des vœux… l’ingrat en fait pour son amante ; |
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Et son farouche orgueil, que je n’ai pu dompter, |
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Ne se souvient de moi que pour me détester. |
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Ah ! quand tu vins tremblant, au sortir du naufrage, |
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M’offrir de tes malheurs l’attendrissante image, |
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Moi-même je devais, prévenant tes affronts, |
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Te replonger vivant dans ces gouffres profonds, |
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Dans ces gouffres affreux que le sort te prépare, |
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Habités par la mort et voisins du Ténare. |
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Dans ton cœur ennemi, pourquoi mon faible bras |
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Hésita-t-il alors de porter le trépas ? |
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Sur la tête du fils offert à ma colère, |
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Ma main devait venger la trahison du père ; |
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Et ta mort, m’épargnant un fatal entretien, |
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Devait punir son crime et prévenir le tien. |
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Mon orgueil, offensé des mépris d’un parjure, |
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Se croyait désormais à l’abri d’une injure : |
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Je défiais l’Amour, auteur de tous mes maux ; |
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Je jurai d’immoler au soin de mon repos |
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Tous les infortunés que leur destin funeste |
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Conduirait vers ces bords que Calypso déteste ; |
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Leur sang a cimenté cet horrible serment ; |
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J’ai cru, dans chacun d’eux, immoler un amant ; |
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Tu parus, mon courroux s’armait pour ton supplice ; |
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Tu t’avances, je vois… j’aime le fils d’Ulisse : |
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A la tendre pitié j’abandonne mon cœur, |
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J’y laisse entrer l’amour au lieu de la fureur. |
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Au meurtre dès long-temps ma main accoutumée, |
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Ma main par un mortel se vit donc désarmée ; |
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Je n’osai la porter dans ton coupable flanc ; |
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Sanglante, je craignis de répandre le sang. |
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Cette divinité dont le mâle courage |
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Jadis se nourrissait de meurtre et de carnage, |
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Dont la rage guidait les farouches transports, |
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Dont le bras tant de fois ensanglanta ces bords, |
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A l’aspect d’un mortel, désarmée et tremblante, |
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Soupire et n’est déjà qu’une timide amante. |
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Calypso ne hait plus en ce funeste jour ; |
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Le poignard à la main, elle implore l’Amour. |
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Qu’aisément tu surpris ma raison égarée ! |
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De mon cœur imprudent je te livrai l’entrée. |
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Je respectai ces jours, ces jours infortunés, |
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Des piéges du trépas sans cesse environnés. |
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O souvenir cruel d’une ardeur insensée ! |
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O pleurs ! ô désespoir d’une amante offensée ! |
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Télémaque !… Eucharis !… Détestables amans ! |
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Malheureuse ! Que faire en ces affreux momens ! |
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Vous m’évitez en vain, je vole sur vos traces… |
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Mais que dis-je ? Voudrais-je augmenter mes disgrâces ? |
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Mes yeux pourraient-ils voir leurs transports amoureux, |
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Et leurs embrassemens insulter à mes feux ? |
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Encor, si je pouvais, au gré de ma furie, |
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Briser le nœud cruel qui m’enchaîne à la vie, |
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Étouffer mes douleurs dans le sein du trépas… |
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Mais je ne peux mourir… Eh bien ! toi, tu mourras ! |
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Oui, je veux dans ton sang plonger ma main fumante, |
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Sous les yeux, dans les bras de ton indigne amante. |
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Oui, dans ses bras sanglans, ingrat, tu vas périr : |
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Elle triomphera de t’avoir vu mourir. |
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. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . |
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Dieux ! vengez par mes mains son infidélité ; |
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Je vous pardonne alors mon immortalité. |
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Non, c’est peu de la mort pour une telle offense ; |
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Ah ! par mon désespoir, jugez de ma vengeance. |
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Sombre divinité des malheureux amans, |
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Cruelle Jalousie, arme tous tes serpens ; |
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Allume dans mon cœur tous les feux de la rage ; |
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Je le soumets à toi, règne en moi sans partage ; |
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Étouffe de l’amour les soupirs et les vœux : |
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C’en est fait, je me livre à tes plaisirs affreux ; |
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Change en noire furie une timide amante ; |
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Enhardis ce poignard dans ma main chancelante… |
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Que dis-je ? Il n’est plus temps, il a dû m’échapper. |
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Eucharis, dans tes bras, il fallait le frapper. |
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O souvenir affreux ! jour fatal à ma gloire, |
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Où ma présence même ennoblit sa victoire ! |
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Je courais me venger et te percer le sein ; |
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Elle vit le poignard qui tombait de ma main : |
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Elle vit expirer mon impuissante rage… |
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Qu’elle va détester ce funeste avantage ! |
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Oui, sur elle je veux punir ta trahison : |
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Je veux de tes mépris lui demander raison. |
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Si tu veux adoucir le malheur qui l’accable. |
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Pour la justifier, cesse d’être coupable ; |
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Viens me rendre le cœur qu’elle m’avait ravi. |
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Ah ! si du repentir le crime était suivi, |
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Si tu venais enfin, terminant mon supplice, |
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Dans mes yeux attendris lire ton injustice ; |
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Si ta bouche abjurait ta haine et ta fierté, |
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Je ne me souviendrais de ma divinité |
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Que pour rendre immortels tes feux et ma tendresse. |
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Viens désarmer mon bras, c’est l’Amour qui t’en presse |
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Viens régner avec moi. C’en est fait ; oui, je veux |
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Que le dieu de mon cœur soit le dieu de ces lieux ; |
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Que du bruit de mes feux l’univers retentisse ; |
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Qu’à ma félicité tout l’Olympe applaudisse ; |
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Qu’élevé désormais au rang des immortels, |
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Tu partages l’encens qu’on offre à mes autels. |
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Sous les berceaux fleuris de ce riant bocage, |
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Dans cet Olympe enfin, le céleste breuvage |
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Nous sera présenté par la main des amours ; |
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Et seuls ils fileront la trame de nos jours. |
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Ne crains point qu’à leurs mains la Parque les ravisse ; |
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Viens me rendre un bonheur qui jamais ne finisse ; |
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Que d’éternels plaisirs scellent notre union… |
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Songe délicieux ! charmante illusion ! |
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Pouvez-vous un moment occuper ma pensée ? |
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Ah ! cessez d’abuser une amante insensée ; |
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Pour mon cœur malheureux les plaisirs sont-ils faits ? |
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Inutiles soupirs ! inutiles souhaits ! |
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Aveugle Calypso ! déesse infortunée ! |
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Hélas ! à mon malheur je suis donc enchaînée ! |
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Il faudra de regrets me nourrir chaque jour ; |
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Je verrai tout finir, excepté mon amour. |
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Comment me dérober au feu qui me dévore ? |
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Je retrouve partout le cruel qui m’abhorre. |
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Ton image importune irrite mes ennuis : |
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Présent, tu me fuyais ; absent, tu me poursuis. |
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Peut-être apprendras-tu ma triste destinée ; |
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Mais si tu sais les maux où tu m’as condamnée, |
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Si du moins la pitié peut encor t’attendrir, |
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Plains-moi, surtout plains-moi de ne pouvoir mourir. |
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