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CHE_1/CHE82
André de CHÉNIER
ŒUVRES POÉTIQUES
tome I
1790
POÈMES
La Superstition
UN mensonge vieillit, il devient ennuyeux ; 12
Il prend une autre forme et reparaît aux yeux. 12
Pensant le fuir, trompés à sa ruse infidèle, 12
Nous courons l'embrasser sous sa forme nouvelle. 12
5 Nous fuyons un prestige, une vaine fureur, 12
Non pour la vérité, mais pour une autre erreur. 12
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J'aime à voir les humains, ces êtres glorieux 12
Nés pour lever la tête et regarder les cieux, 12
Dans la fange à plaisir courbant ce front superbe, 12
10 Marcher sur quatre pieds et braire et brouter l'herbe. 12
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Que le glaive des lois frappe le malfaiteur. 12
C'est à nous de punir le prophète menteur. 12
Voulant nous abuser, c'est nous seuls qu'il outrage. 12
Arabe vagabond, s'il ose, à chaque page, 12
15 Enfler de contes vains ses orgueilleux récits, 12
Et frapper sur l'épaule à des rois ses amis ; 12
S'il étale partout, dans sa plate éloquence, 12
Des temps, des lieux, des mœurs une absurde ignorance, 12
Aussitôt contre lui l'équitable raison 12
20 S'arme du ridicule et non de la prison. 12
Mais si l'on vient ...............avec scandale
L'immoler aux abois d'une plume vénale… 12
ALEXANDRE VI
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Ses enfants ! Les chrétiens ne sont plus sa famille ! 12
Quoi ! l'Église de Dieu n'est plus sa seule fille !… 12
25 Leur naissance est un crime et pour eux et pour lui. 12
Et quels enfants encore il avoue aujourd'hui ! 12
L'une, à la fois, grand Dieu ! sa fille et sa maîtresse ! 12
(O nom de la Pudeur ! ô saint nom de Lucrèce !) 12
Tous méchants comme lui, dignes de son amour. 12
30 Lui seul dans l'univers put leur donner le jour. 12
Ses fils, vraiment ses fils, lâche et coupable engeance, 12
A son école impie ont appris la vengeance, 12
L'imposture, la soif de l'or et des États, 12
L'art des poisons secrets et des assassinats. 12
35 Sa fille, à l'impudence en naissant élevée ! 12
A ses époux mourants par son père enlevée ! 12
A son frère, à son père indignement aimé, 12
Son sacrilège lit n'est pas même fermé. 12
Prêtre fornicateur, d'un inceste adultère 12
40 Le monstrueux mélange était fait pour lui plaire. 12
Des baisers de la fille, et des crimes des fils, 12
Ou le sceptre, ou la pourpre, ou la mitre est le prix. 12
Non, certes, l'Esprit-Saint, ennemi du parjure, 12
Ne saurait habiter cette poitrine impure. 12
45 Non, les anges du ciel n'approchèrent jamais 12
Ces lèvres, ni ces yeux affamés de forfaits. 12
O Christ ! agneau sans tache, ô Dieu sauveur de l'homme ! 12
Non, tu ne souris point sur les autels de Rome, 12
Lorsque parmi ses fils, ce pontife assassin, 12
50 Que sa fille impudique a tenu sur son sein, 12
Couvrant des trois bandeaux sa tête diffamée, 12
Ouvre, pour te louer, sa bouche envenimée ; 12
Quand ses mains, de poisons artisans odieux, 12
Touchent ton corps sacré, nourriture des cieux ; 12
55 Quand ...........................................................................................
Il tend sur les chrétiens sa droite incestueuse, 12
Et, pour bénir le peuple, ose de rang en rang, 12
Lever ses doigts souillés de crimes et de sang. 12
… Hommes saints, hommes dieux, exemples des Romains, 12
60 Divin Caton, Brutus, les plus grands des humains, 12
Pensiez-vous que jamais, plein d'orgueil et de gloire, 12
Au milieu des respects d'un stupide auditoire, 12
Dans un poudreux gymnase au mensonge immolé, 12
Un rhéteur imbécile et d'ignorance enflé, 12
65 Sur la foi d'un sophiste élève de Carthage, 12
Dût prouver que vos cœurs n'eurent qu'un vain courage 12
Et qu'une vertu vaine, et que ce prix si doux 12
De s'immoler pour elle était vain comme vous ? 12
Vous dévouer aux feux où le crime s'expie ; 12
70 Vous prodiguer les noms et de lâche et d'impie, 12
Pour n'avoir pas voulu montrer à l'univers 12
Aux pieds du crime heureux la vertu dans les fers ? 12
Oui, partout invoquant le sceptre ou la tiare, 12
Partout, de l'ignorance appui lâche et barbare, 12
75 Partout, d'un fer absurde armant ses viles mains, 12
Partout, au nom des dieux, écrasant les humains, 12
La stupidité règne, insolente, impunie, 12
Tourmente les talents, opprime le génie, 12
Punit la vérité du courageux affront 12
80 Qui, sous le diadème, a fait rougir son front. 12
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