Métrique en Ligne
CHA_2/CHA12
François-René de CHATEAUBRIAND
POÉSIES DIVERSES
1797-1827
II
A Lydie
Imitation d'Alcée, poète grec
Lydie, es-tu sincère ? Excuse mes alarmes : 12
Tu t'embellis en accroissant mes feux ; 10
Et le même moment qui t'apporte des charmes 12
Ride mon front et blanchit mes cheveux. 10
5 Au matin de tes ans, de la foule chérie, 12
Tout est pour toi joie, espérance, amour ; 10
Et moi, vieux voyageur, sur ta route fleurie 12
Je marche seul et vois finir le jour. 10
Ainsi qu'un doux rayon quand ton regard humide 12
10 Pénètre au fond de mon cœur ranimé, 10
J'ose à peine effleurer d'une lèvre timide 12
De ton beau front le voile parfumé. 10
Tout à la fois honteux et fier de ton caprice, 12
Sans croire en toi, je m'en laisse enivrer. 10
15 J'adore tes attraits, mais je me rends justice : 12
Je sens l'amour et ne puis l'inspirer. 10
Par quel enchantement ai-je pu te séduire ? 12
N'aurais-tu point dans mon dernier soleil 10
Cherché l'astre de feu qui sur moi semblait luire 12
20 Quand de Sapho je chantais le réveil ? 10
Je n'ai point le talent qu'on encense au Parnasse. 12
Eussé-je un temple au sommet d'Hélicon, 10
Le talent ne rend point ce que le temps efface ; 12
La gloire, hélas ! ne rajeunit qu'un nom. 10
25 Le Guerrier de Samos, le Berger d'Aphélie1 12
Mes fils ingrats, m'ont-ils ravi ta foi ? 10
Ton admiration me blesse et m'humilie : 12
Le croirais-tu ? je suis jaloux de moi. 10
Que m'importe de vivre au delà de ma vie ? 12
30 Qu'importe un nom par la mort publié ? 10
Pour moi-même un moment aime-moi, ma Lydie, 12
Et que je sois à jamais oublié ! 10
Deux ouvrages d'Alcée.
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