Métrique en Ligne
CAO_1/CAO2
Jean Baptiste CAOUETTE
LES VOIX INTIMES
1892
POÉSIES DIVERSES
RENOUVEAU
A M. BENJAMIN SULTE
Le doux printemps vient de paraître 8
Sous son manteau de velours vert, 8
Et déjà l'on voit disparaître 8
Tous les vestiges de l'hiver. 8
5 Son œil à l'éclat de la braise : 8
A la chaleur de ses rayons 8
Naissent lilas, fleur, rose et fraise. 8
Abeilles d'or et papillons. 8
Les arbres engourdis naguère 8
10 Semblent dresser plus haut le front, 8
Car la nature, en bonne mère, 8
Verse la sève dans leur tronc. 8
Au plus épais de la ramure 8
Les oiseaux préparent leurs nids, 8
15 Sans s'occuper si la pâture 8
Ou le lin leur seront fournis. 8
Du sol jaillit plus d'une source 8
Que la froidure emprisonnait ; 8
Et le ruisseau reprend sa course 8
20 A travers clos et jardinet. 8
Sur le bord de maintes rivières 8
L'on voit le castor vigilant 8
Transporter le bois et les pierres 8
Pour bâtir son gîte étonnant. 8
25 La brise, sylphide légère, 8
Fait la cour à toutes les fleurs, 8
Puis vole embaumer l'atmosphère 8
Des plus enivrantes senteurs. 8
De la cime de nos montagnes 8
30 Se précipite le torrent 8
Qui fertilise nos campagnes 8
Avec les eaux du Saint-Laurent. 8
A nos fenêtres, l'hirondelle 8
S'annonce par des cris joyeux ; 8
35 Elle revient à tire-d'aile 8
Charmer les jeunes et les vieux. 8
Au palais comme à la chaumière, 8
La porte s'ouvre à deux battants : 8
Riche et pauvre ont soif de lumière 8
40 D'air pur, de parfums odorants. 8
Parfois l'on quitte sa demeure 8
Pour aller prendre un gai repas 8
Sur la pelouse où toute à l'heure, 8
Bébé fera ses premiers pas. 8
45 Plus loin les colons sur leur terre 8
Travaillent courageusement 8
A l'œuvre utile et salutaire 8
Qu'on nomme le défrichement. 8
Les uns creusent, les autres sèment 8
50 Ou bien coupent les arbres morts ; 8
Ces braves bûchent, chantent, s'aiment 8
Et dorment la nuit sans remords ! 8
La fillette en robe de bure 8
Chante et cultive tout le jour ; 8
55 Le soir venu, sa lèvre pure 8
Dira peut-être un mot d'amour !… 8
Oui, l'homme, les oiseaux, les plantes 8
Et l'onde aux bruits mystérieux 8
Mêlent leurs voix reconnaissantes 8
60 Pour célébrer le Roi des cieux. 8
Car tout ce qui vit et respire, 8
Tout ce qui chante, pleure ou croit, 8
Reconnaît qu'il est sous l'empire 8
D'un esprit souverain et droit ! 8
65 Printemps, réveil de la nature, 8
Oh ! sois le bienvenu toujours ! 8
Quand tu parais, la créature 8
Espère encore des beaux jours ! 8
C'est toi qui donnes à la plaine 8
70 Son riche et moelleux vêtement ; 8
C'est toi qui fais germer la graine 8
D'où sortira notre aliment ! 8
C'est toi qui rends au pulmonaire 8
La force et souvent la santé ; 8
75 C'est toi que l'Indien vénère 8
En recouvrant la liberté ! 8
O printemps, messager Céleste, 8
Admirable consolateur 8
Ton éclat seul nous manifeste 8
80 La puissance du Créateur ! 8
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