Métrique en Ligne
CAM_1/CAM23
corpus Pamela Puntel
Aimé CAMP
POÉSIES NATIONALES
1871
L’ARCHEVÊQUE ROGER ET LE ROI GUILLAUME
OU LA TOUR DE LA FAIM
I
Ministre du Dieu bon, mais ministre parjure, 12
Prêtre infidèle au crucifix, 8
Roger Ubaldini, pour venger son injure, 12
Saisit Ugolin et ses fils, 8
5 Dans une épaisse tour, sous une bonne escorte, 12
Les traîna rudement bouclés, 8
Et du simple donjon ayant cloué la porte, 12
Dans le fleuve on jeta les clés. 8
Que fut le dénoûment de ce lugubre drame ? 12
10 Des prisonniers quel fut le sort ? 8
Le barde florentin le dévoile, et notre âme 12
En ressent un frisson de mort. 8
Ineffables douleurs ! Les enfants disaient : «Père, 12
Tu nous as vêtus de ces chairs. 8
15 Mange-les. Tu le peux. « Et lui se désespère 12
De voir souffrir ces fils si chers. 8
Longtemps quand gémissait ou le vent ou l’orfraie ; 12
On croit ouïr : «du pain… Je meurs» 8
Et longtemps Mise, aux bords de l’Arno qui s’effraie, 12
20 Recueillit ces tristes clameurs. 8
Dante dit qu’aux enfers, accroupi dans la glace, 12
Ugolin brise de Roger 8
Le crâne sous ses dents, et jamais ne se lasse 12
De le mordre et de le ronger. 8
II
25 Ubaldini teuton, pieuse bête fauve, 12
O Guillaume, Tartufe-roi, 8
Oses-tu l’invoquer le rédempteur, qui sauve, 12
Toi qui foules aux pieds sa loi ? 8
Oses-tu bien prier que le ciel illumine 12
30 Ton Augusta, reine, et les tiens, 8
Toi qui veux, dans Paris, tuer par la famine 12
Ses deux millions de chrétiens ? 8
Ta condamnation dans les cieux est écrite. 12
Du Christ tu déchires le corps. 8
35 Tu prends des bains de sang, ô vieillard hypocrite, 12
Est tu convoites nos trésors. 8
Noël ! Noël ! Voici le nouveau Charlemagne ! 12
Meurtre, rapine, embrasement, 8
C’est ce qui le devance, et ce qui l’accompagne : 12
40 Dons du joyeux avènement ! 8
Tes canons ont choisi pour leurs points de repère 12
Nos monuments hospitaliers. 8
Ton palais d’empereur devrait être un repaire 12
Dans les plus sauvages halliers. 8
45 Quoi ! la grande cité, dans tout son périmètre, 12
Serait une tour de la faim ! 8
Son vaillant peuple, ô doux vainqueur, gracieux maître, 12
N’aurait que tes obus pour pain ! 8
Ah ! puisses-tu périr dans nos plaintes suantes 12
50 Du sang des Germains égorgés ! 8
par nos loups, nos vautours, puissent tes chairs puantes 12
Et ton vieux crâne être rongés ! 8
logo du CRISCO logo de l'université