Métrique en Ligne
BUS_1/BUS25
Alfred BUSQUET
POÉSIES
1884
RENCONTRE
A PAUL BAUDRY.
Un soir qu’elle errait, la Fortune 8
Au bord d’un puits a rencontré 8
L’Amour, voyageur égaré. 8
Qui dormait au clair de la lune ; 8
5 Le front méchant et l’air moqueur, 8
Le bras replié sous la tête. 8
En main sa flèche toujours prête. 8
Il reposait, — le dur vainqueur ! 8
Cet enfant, tourmenteur du monde. 8
10 Tu le tiens donc en ton pouvoir. 8
Fortune que le ciel seconde ! 8
Fais-le tomber au gouffre noir ! 8
L’instant est favorable : acquitte 8
Les affronts que ton nom subit, 8
15 Rachète ton passé, maudite, 8
Délivre-nous de ce maudit ! 8
Venge les deux, venge la terre. 8
Du monstre charmant, abhorré. 8
Et que ton nom déshonoré 8
20 Soit béni pour ce crime austère ! 8
Sur la margelle où l'enfant dort. 8
Voici que s’assoit la Fortune : 8
Elle réveille et sans rancune 8
L’arrache au péril de la mort ! 8
25 Il ouvre un œil et se détire, 8
Ramasse flèches et carquois. 8
Puis fuit dans les airs sans rien dire. 8
En souriant d’un air narquois : 8
La folle poursuit le volage. 8
30 Soupire et se met à rêver, 8
Et recommence le voyage 8
Qui ne peut jamais s’achever. 8
Paris.
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