Métrique en Ligne
BRS_1/BRS51
Henri BARBUSSE
Les Pleureuses
1895
LE SILENCE DES PAUVRES
A UNE PETITE AVEUGLE
Tu pleures, l'âme reposée.
Avec ses rumeurs sans pitié 8
Le jour assiège ta faiblesse. 8
Tu ne vois rien, l'heure te laisse 8
Et la lumière est à tes pieds. 8
5 Quand parmi la foule sans nombre 8
Tu rayonnes sur le chemin, 8
Si l'on te frôle un peu, ta main 8
Est une caresse dans l'ombre. 8
Tu gardes au soleil d'espoir 8
10 Ta tendresse vague, étoilée… 8
Toujours grave, toujours voilée, 8
Toujours dans la fête du soir ! 8
L'ombre est ta sœur quand tout succombe, 8
Ta sœur près de ces hommes-ci, 8
15 Tous ceux que mêle et qu'adoucit 8
Votre double pitié qui tombe ! 8
Quand avec son éternité 8
Le soir nous berce et nous effraie, 8
Tu deviens de plus en plus vraie 8
20 Parmi la morne vérité. 8
L'azur s'abîme de tendresse. 8
L'amour chante, silencieux, 8
Les ténèbres ouvrent tes yeux. 8
Ton front éclot et se redresse. 8
25 Tu te mêles au vieux martyr 8
De la nuit seule sur le monde. 8
Tout se tait et l'ombre est profonde ; 8
Petite enfant qui vois souffrir… 8
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