LE FRANC-TIREUR |
LXXIII |
L’AUMÔNIER DU ROI |
|
J'use en vain à rimer cette lugubre histoire |
12 |
|
Et mes jours et mes nuits. Précipitant leur cours, |
12 |
|
Les crimes dont je veux assurer la mémoire |
12 |
|
Vont plus vite cent fois. que mes nuits et mes jours ! |
12 |
|
5 |
Ces bandits s'apprêtaient à passer par les armes |
12 |
|
Un malheureux Français, — il n'importe pourquoi : |
12 |
|
Pour un mot mal sonnant, peut-être, ou pour des larmes ! — |
12 |
|
Un pasteur se rendit chez l'aumônier du roi, |
12 |
|
L'adjura d'obtenir la grâce. du coupable. |
12 |
10 |
Son confrère, l'ayant froidement écouté, |
12 |
|
Lui répondit d'un cœur léger, calme, implacable. |
12 |
|
« S'il est puni de mort, c'est qu'il l'a mérité. |
12 |
|
» Pas de clémence ! Au roi je le disais naguère : |
12 |
|
» Entre la France et nous, Monsieur, c'est une guerre |
12 |
15 |
» Au dernier sang ! » — « Monsieur, dit le pasteur, je voi |
12 |
|
» Que vous ne servez pas le même Dieu que moi !… » |
12 |
|
Il est vrai, ce n'est pas le Dieu de l’Évangile, |
12 |
|
C'est le Dieu de Guillaume ; un Dieu pour les uhlans ! |
12 |
|
Un de ces Dieux pétris et de sang et d'argile, |
12 |
20 |
Qui maintiennent les rois sur leurs trônes tremblants ! |
12 |
|
C'est le Dieu des combats, du meurtre et du pillage, |
12 |
|
A qui le cannibale offre ses prisonniers ; |
12 |
|
C'est le Dieu que Guillaume a fait à son image, |
12 |
|
Et qui méritait bien de pareils aumôniers ! |
12 |
|
25 |
Ce Dieu s'est révélé tout entier dans l'apôtre : |
12 |
|
Qui, certe, au dernier sang !… mais ce sera le vôtre ! |
12 |
|
Décembre 1870.
|