Métrique en Ligne
BRJ_1/BRJ59
corpus Pamela Puntel
Jules BARBIER
LE FRANC-TIREUR
1871
LE FRANC-TIREUR
LIX
LE 2 DÉCEMBRE
Voici le jour où sur nos pères 8
Brilla le soleil d'Austerlitz ; 8
Où, plus tard, des cieux moins prospères, 8
L'ombre descendit sur leurs fils ! 8
5 Dans sa superbe indifférence. 8
Le canon, sujet à l'erreur, 8
Annonçait gaîment à la France 8
Sa sottise et son empereur ! 8
Et voyez, — étrange ironie ! — 8
10 A quoi le sort m'a condamné : 8
four moi cette date est bénie : 8
C'est le jour où l'enfant est né ! 8
Oui, ma tille venait de naître 8
Au bruit de ce fatal salve !… 8
15 Et c'est le seul malheur peut-être 8
Qui lui soit jamais arrivé. 8
Sur le berceau que son sourire 8
Illuminait, je lis ce vœu : 8
Qu'elle survécût à l'Empire ; 8
20 Et je fus entendu de Dieu ! 8
Elle survit ; il fait naufrage ; 8
Et désormais ce jour fêté 8
Brille à mes yeux, sans qu'un nuage 8
En trouble la sérénité ! 8
25 Elle a même, à ce qu'il faut croire, 8
Toutes les grâces du destin ; 8
Car ce sont des bruits de victoire 8
Qui nous arrivent ce matin ! 8
Notre Loire, après deux batailles, 8
30 Voit s'enfuir les envahisseurs ; 8
Paris, vainqueur sous ses murailles. 8
Attend ses nouveaux défenseurs ! 8
Dieu cesse enfin d'être sévère 8
A ce pays qu'il déchira ; 8
35 Ce que l'Empire n'a pu faire, 8
La République le fera ! 8
Ces mêmes Rois qui se querellent 8
S'uniront pour en triompher, 8
Ces bons frères, comme ils s'appellent, 8
40 S'embrasseront pour l'étouffer ; 8
Qu'importe ?… mes frayeurs me quittent, 8
Quand mon regard mesure et suit 8
Ces petits princes qui s'agitent 8
Aux mains de Dieu qui les conduit ! 8
45 Que Bonaparte aide Guillaume 8
En ses-complots impertinents : 8
L'Empire n'est plus qu'un fantôme : 8
Je ne crois pas aux revenants ! 8
O jour du deux Décembre, monte 8
50 Sur l'horizon, pur et vermeil ; 8
Te voilà lavé de ta honte, 8
Et tu retrouves ton soleil !… 8
Mais quoi ! l'hiver te fait cortège ; 8
Ton soleil est trop faible, hélas ! 8
55 Pour fondre ce tapis de neige 8
Que la terre étend sous nos pas ! — 8
Pardonne, enfant, si je n'apporte, 8
Pour te fêter, que cette fleur ; 8
Je l'ai trouvée à moitié morte, 8
60 Étiolée et sans couleur ! 8
Mais, avec cette fleur flétrie. 8
J'offre un peuple ressuscité, 8
Les victoires de la patrie, 8
Et celles de la liberté ! 8
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