Métrique en Ligne
BRJ_1/BRJ13
corpus Pamela Puntel
Jules BARBIER
LE FRANC-TIREUR
1871
LE FRANC-TIREUR
XIII
L'ARMÉE DES MORTS
Leurs files passaient, grises de poussière ; 10
Les tambours battaient, les clairons sonnaient ; 10
La terre et le ciel étaient sans lumière ; 10
Les drapeaux troués au vent frissonnaient. 10
5 Soldats et chevaux, légions sans nombre, 10
Chariots roulant avec des bruits sourds, 10
De l'ombre sortis, s'enfonçaient dans l'ombre ; 10
Ils passaient encore, ils passaient toujours ! 10
Un vieux paysan, qui brûlait ses gerbes, 10
10 Pour n'en rien laisser aux bandits Prussiens, 10
Dit : c'est Mac-Mahon !… Ces drapeaux superbes 10
Palpitent de haine, et ce sont les siens !… 10
Non ! Ce n'était pas cette renommée. 10
Ce brave suivi de ses braves… non ! 10
15 O Prussiens, c'était l'innombrable armée 10
Des morts qu'éveillait la voix du canon ; 10
Des morts d'autrefois, de ceux qu'enveloppe 10
Un linceul de gloire, et qui dormaient là, 10
Tombés sous les coups de toute l'Europe, 10
20 Tombés en chassant les Huns d'Attila ! 10
Tous s'étaient levés au bruit de la foudre ; 10
Et cette poussière, où de leurs drapeaux 10
S'effaçaient les plis, n'était que la poudre 10
Qu'amasse le temps au fond des tombeaux ! 10
25 Foulez maintenant ce sol qu'ils défendent ; 10
Contre les vivants redoublez d'efforts ; 10
Ces tombeaux ouverts demain vous attendent ; 10
Pour vous y pousser nous avons les morts ! 10
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