Métrique en Ligne
BRI_2/BRI130
Auguste BRIZEUX
LA FLEUR D’OR
1874
LIVRE HUITIÈME
A PARIS
Les Pôles
I
À UN DESSERVANT
PRÊTRE, te souvient-il qu’un soir, à Loc-Tûdi, 12
Au pied de ton autel je te surpris en larmes, 12
Serrant contre ton cœur le crucifix, tes armes, 12
Plongé dans la prière et presque anéanti ? 12
5 Au bruit seul de ma voix tu relevas la tête 12
(C’était le front des morts, et non plus des vivants) ; 12
Alors, tournant vers moi tes yeux doux et fervents, 12
Tu me dis : « J’ai vaincu ! combats aussi, poète. » 12
Parlant de l’infini, du ciel et des élus, 12
10 Nous passâmes deux jours dans ton saint presbytère ; 12
Les ailes de ton âme avaient quitté la terre, 12
Et l’espace et le temps pour toi n’existaient plus. 12
Pôle effrayant de la pensée. 8
Qui pourrait sans vertige atteindre à ta hauteur ? 12
15 L’âme humaine, aisément lassée. 8
Fuit tes sommets de glace et l’ardent équateur. 12
II
AU DOCTEUR P***, DE MARSEILLE
Et vous, de la Nature infatigable prêtre, 12
Qui sondez, curieux, les causes de chaque être, 12
Et sur vos creusets tour à tour 8
20 Pâlissez d’épouvante et tressaillez d’amour, 12
Rappelez-vous l’instant où des profonds royaumes 12
La déesse évoqua des myriades d’atomes, 12
Globules mouvants et gazeux 8
L’un l’autre s’attirant, et vous, homme, avec eux ! 12
25 O terreurs de l’esprit ! Déjà, comme un problème, 12
Dans le Tout, noir chaos, il se cherchait lui-même, 12
Car déjà vos pensers épars 8
De leur faisceau rompu sortaient de toutes parts* 12
Pôle effrayant de la pensée, 8
30 Qui pourrait sans vertige atteindre à ta hauteur ? 12
L’âme humaine, aisément lassée, 8
Fuit tes sommets de glace et l’ardent équateur. 12
Les forces attractives l’ont emporté. Depuis que ces vers sont écrits, le jeune savant, dans une excursion aux environs de Marseille, a disparu au fond d’un puits naturel.
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