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BEN_1/BEN69
Isaac de BENSERADE
Poésies de Benserade
1697
STANCES, SONNETS, ÉPIGRAMMES, ETC.
À Mademoiselle de Guerchy, contre Mariamne.
STANCES.
OUI, je vous dis et vous répète 8
Que Mariamne étoit coquette, 8
Et n’eut pu se passer d’amant. 8
Ce n’est point médisance noire ; 8
5 Et je m’en rapporte au roman 8
Où vous croyez mieux qu’à l’histoire. 8
Son âme ne fut point ingrate 8
Aux passions de Tiridate, 8
Qui fut l’un de ses favoris ; 8
10 Et c’est d’elle que vient la mode 8
De faire enrager les maris, 8
Alors qu’ils sont vieux comme Hérode. 8
Lorsque ce livre enseigne comme 8
Elle baisa ce galant homme, 8
15 Dieu sçait ce qu’entend le lecteur : 8
Et vous-même êtes assez fine 8
Pour vous imaginer l’auteur 8
Plus modeste que l’héroïne. 8
On ne pouvoit vivre avec elle : 8
20 Hérode et toute sa séquelle 8
Lui passèrent pour des dragons : 8
Bref, sa conduite impertinente 8
Eût, je crois, fait sortir des gonds 8
Madame votre gouvernante. 8
25 La pauvre dame toute bonne 8
Eût vu cette fière personne 8
Sans cesse la contrarier ; 8
Et dans son humeur inquiète 8
Eût trouvé pis que le brasier, 8
30 Et pis que les brins de vergette. 8
Elle aimoit, elle étoit aimée. 8
Mais épargnons la renommée, 8
Et laissons-la pour ce qu’elle est : 8
Suffit que c’est un sot modèle, 8
35 Et qu’on a beaucoup d’intérêt 8
Que vous ne soyez pas comme elle. 8
De grâce, m’allez pas redire 8
Que j’en ai fait une satire, 8
Où je la mets en beaux draps blancs, 8
40 Et que mes muses libertines 8
Ont après quelques deux mille ans 8
Mis Mariamne aux Feuillantines. 8
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