Métrique en Ligne
BCH_1/BCH109
Maurice Bouchor
LES POËMES DE L'AMOUR ET DE LA MER
1876
III
L'AMOUR DIVIN
XI
Que la brise du ciel est légère et joyeuse, 12
Comme en silence au loin glissent les blanches voiles ! 12
Que la voix de la mer, grave et religieuse, 12
Monte tranquillement vers les belles étoiles ! 12
5 Oh ! quand la sombre nuit apparaît, et déploie 12
Ses ailes, lentement, comme un oiseau sauvage, 12
Moi, mon âme s'éveille — et ma plus grande joie 12
Est d'écouter rouler les galets sur la plage. 12
Tout est si beau, mes yeux s'emplissent d'un tel rêve ! 12
10 L'Océan monstrueux me donne le vertige. 12
La lune, que le flot fait danser et soulève, 12
Semble une fleur des eaux qui tourne sur sa tige. 12
Là-bas de grands oiseaux traversent l'air tranquille, 12
Mêlant à l'harmonie exquise du silence 12
15 Le faible battement de leurs ailes… la ville 12
Rêve derrière moi qui me souviens et pense. 12
Qu'il ferait bon mourir par cette nuit si belle ! 12
S'anéantir, mêler son âme à l'âme errante 12
Des parfums délicats que chasse devant elle 12
20 La brise de la mer qu'ils ont faite odorante ! 12
Dans le monde des sons, des parfums et des nues, 12
Dans cet éblouissant et fantasque royaume 12
Où, subissant l'effort de causes inconnues, 12
Pour reparaître ailleurs fuit sans cesse l'atome ! 12
25 Ne plus penser ; et dans la nuit fraîche et sereine 12
Où la lune d'argent sur les vagues tournoie, 12
Enfin débarrassé de cette écorce humaine, 12
Ne plus jamais pleurer, même des pleurs de joie ! 12
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