Métrique en Ligne
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corpus Pamela Puntel
Hippolyte BAYE
LA FRONTIÈRE
ESSAIS DE POÉSIES
1871
LA MENDIANTE DE BAZEILLES
« Donnez ! » me criait sur la route 8
Une enfant qui courait pieds nus. 8
« Donnez ! que votre cœur écoute 8
Les pleurs amers du mien venus. 8
5 Donnez ! Autrefois notre père 8
Du travail tirait un peu d'or. 8
Seulement de quoi vivre encor, 8
Mes petites sœurs et mon frère ! 8
Les ennemis forts et nombreux 8
10 S'en vinrent déchirer la France. 8
Partout — riches ou malheureux — 8
Ce fut un long cri de souffrance. 8
Après des batailles, un soir, 8
Il en vint un, puis un cortège. 8
15 Ma mère dit : « Dieu nous protège ! 8
« Longtemps il nous faudra les voir. » 8
Pour apprivoiser leur colère, 8
On servit pain, chair et boisson, 8
Jamais aux jours de grand salaire 8
20 On n'en vit tant à la maison. 8
Mais toujours, d'une voix terrible, 8
A nouveau chacun exigeait ; 8
Et son fusil se dirigeait 8
Sur nous, comme sur une cible. 8
25 De peur, nous frémissions tout bas. 8
Ma mère osa trahir ses larmes. 8
Soudain l'un d'eux bondit, — hélas ! — 8
Jure et la perce de ses armes. 8
L’œil en feu, mon père à leurs coups 8
30 Oppose une hache : on l'écrase. 8
Nous fuyons ; le toit qui s'embrase 8
Pétille au loin derrière nous. 8
Nous errons près de la frontière. 8
Au village habite la Mort. 8
35 La Mort est douce au cimetière : 8
Là, près de Dieu, l'innocent dort. 8
Mais une ruine flétrie, 8
Pour nos parents quel dur tombeau ! 8
Pas un débris, pas un lambeau 8
40 Qui ne parle de leur furie ! 8
Nous mendions par les chemins, 8
Vivant des dons de tout le monde. 8
Il est des êtres inhumains 8
Qui disent : « Va-t'en, vagabonde ! » 8
45 Amer est le pain d'étranger ; 8
Mais il aide notre misère. 8
Donnez, et notre petit frère 8
Pourra grandir et nous venger !… 8
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