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corpus Pamela Puntel
Hippolyte BAYE
LA FRONTIÈRE
ESSAIS DE POÉSIES
1871
LA FLORAISON GUERRIÈRE
Au soleil pâlissant, entre quatre murailles 12
Qui protègent la paix des morts, 8
Dans un angle où la terre a laissé ses entrailles 12
S'ouvrir aux vaincus du dehors, 8
5 Voyez quelques soldats pénètrent en silence, 12
Courbés sur un obscur fardeau. 8
Un haillon éploré dans leurs pieds se balance, 12
De la mort triste et vain rideau. 8
Le gazon soulevé, comme un flot sur les ondes, 12
10 Dans l'air un instant suspendu, 8
Sur l'étroite limite où se touchent deux mondes, 12
Docile au signal attendu, 8
Retombe ; — et la lueur vague du crépuscule 12
Flotte encor dans l'éther pâli 8
15 Que déjà sur les flancs du nouveau monticule 12
S'asseoit le ténébreux oubli. 8
Oui, soldat inconnu, les Voix confraternelles,— 12
Les voix qui, naguère, en trinquant 8
Sous les festons vineux des pendantes tonnelles 12
20 T'offraient un verre provoquant, 8
De tes traits disparus se souviendront à peine ! 12
A peine, pauvre fantassin, 8
Ton départ s'est-il vu dans cette ruche humaine, 12
Comble d'un éternel essaim. 8
25 Un étranger se glisse en ta cellule vide. 12
Il dort où ton bras désarmé 8
Te berçait dans la nuit, de jours encore avide, 12
Peut-être heureux, peut-être aimé. — 8
Demain quand les clairons, émules de l'aurore, 12
30 Demain quand les tambours, battants, 8
Troublant de l'escalier la spirale sonore, 12
Chasseront les songes flottants, 8
Ton ombre, errante autour des murs de la caserne, 12
A ton rang pourra voir demain, 8
35 L'autre puiser la poudre ardente à ta giberne 12
Et briller ton arme à sa main. ' 8
— Ainsi meurt le soldat. Sa courte renommée 12
Tombe avec les rayons du jour ; 8
Pour pleurer ses enfants, il faudrait à l'armée 12
40 Trop de larmes et trop d'amour. 8
Ce n'est pas une mère à la molle tendresse. 12
Sur ses fils morts son cœur courbé 8
N'épanche pas les flots d'une longue tristesse, 12
Comme l'antique Niobé. 8
45 Mais, imitant de Sparte une fière matrone, 12
Elle offre aux autels infernaux 8
Leurs mânes refroidis et, redoublant l'aumône, 12
Enfante des guerriers nouveaux. 8
Quand, au mois radieux l'arbuste se déflore, 12
50 Sous les coups lointains d'un enfant, 8
Une sève nouvelle aussitôt vient éclore 12
A son front vert et triomphant. 8
Ainsi, lorsque la Mort crible, dans sa colère, 12
Les régiments épanouis, 8
55 On voit poindre sans fin la sève populaire 12
Sur les germes évanouis. 8
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