Métrique en Ligne
BAU_1/BAU87
Charles BAUDELAIRE
LES FLEURS DU MAL
1857-1861
SPLEEN ET IDÉAL
LXXXIII
Le Goût du néant
Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte, 12
L’Espoir, dont l’éperon attisait ton ardeur, 12
Ne veut plus t’enfourcher ! Couche-toi sans pudeur, 12
Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle butte. 12
5 Résigne-toi, mon cœur ; dors ton sommeil de brute. 12
Esprit vaincu, fourbu ! Pour toi, vieux maraudeur, 12
L’amour n’a plus de goût, non plus que la dispute ; 12
Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte ! 12
Plaisirs, ne tentez plus un cœur sombre et boudeur ! 12
10 Le Printemps adorable a perdu son odeur ! 12
Et le Temps m’engloutit minute par minute, 12
Comme la neige immense un corps pris de roideur ; 12
Je contemple d’en haut le globe en sa rondeur, 12
Et je n’y cherche plus l’abri d’une cahute ! 12
15 Avalanche, veux-tu m’emporter dans ta chute ? 12
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