Métrique en Ligne
BAU_1/BAU18
Charles BAUDELAIRE
LES FLEURS DU MAL
1857-1861
SPLEEN ET IDÉAL
XVII
La Beauté
Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre, 12
Et mon sein, où chacun s’est meurtri tour à tour, 12
Est fait pour inspirer au poëte un amour 12
Éternel et muet ainsi que la matière. 12
5 Je trône dans l’azur comme un sphinx incompris ; 12
J’unis un cœur de neige à la blancheur des cygnes ; 12
Je hais le mouvement qui déplace les lignes ; 12
Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris. 12
Les poëtes, devant mes grandes attitudes, 12
10 Que j’ai l’air d’emprunter aux plus fiers monuments, 12
Consumeront leurs jours en d’austères études ; 12
Car j’ai, pour fasciner ces dociles amants, 12
De purs miroirs qui font toutes choses plus belles : 12
Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles ! 12
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