Métrique en Ligne
BAU_1/BAU15
Charles BAUDELAIRE
LES FLEURS DU MAL
1857-1861
SPLEEN ET IDÉAL
XIV
L’Homme et la mer
Homme libre, toujours tu chériras la mer 12
La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme 12
Dans le déroulement infini de sa lame, 12
Et ton esprit n’est pas un gouffre moins amer. 12
5 Tu te plais à plonger au sein de ton image ; 12
Tu l’embrasses des yeux et des bras, et ton cœur 12
Se distrait quelquefois de sa propre rumeur 12
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage. 12
Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets : 12
10 Homme, nul n’a sondé le fond de tes abîmes, 12
Ô mer, nul ne connaît tes richesses intimes, 12
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets ! 12
Et cependant voilà des siècles innombrables 12
Que vous vous combattez sans pitié ni remord, 12
15 Tellement vous aimez le carnage et la mort, 12
Ô lutteurs éternels, ô frères implacables ! 12
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