Métrique en Ligne
BAN_9/BAN405
Théodore de BANVILLE
LES STALACTITES
1843-1846
L'Âme de la Lyre
Fille des hommes, je suis une parcelle de
l'esprit de Dieu. Cette Lyre est mon corps.
George Sand.
Quand le premier sculpteur eut achevé la Lyre 12
Et caché dans son sein les chants harmonieux ; 12
Ouvrier sans défaut, lorsqu'il eut fait sourire 12
Parmi ses ornements les figures des Dieux, 12
5 Et qu'il eut couronné l'instrument de martyre 12
Avec le vert rameau d'un laurier radieux ; 12
L'indomptable Titan, à son désir fidèle, 12
Qui, tout brûlant encor, vers la voûte éternelle 12
Une seconde fois, tentait de s'envoler, 12
10 Fit, pareil au vautour qui devait l'immoler, 12
Tomber sur le chef-d'œuvre une blanche étincelle 12
Du feu resplendissant qu'il venait de voler. 12
C'est l'âme de la Lyre ; à notre âme invisible 12
Elle se plaint souvent loin du monde réel, 12
15 Souvent, dans une étreinte amoureuse et terrible, 12
Vient la brûler aux feux de son œil immortel ; 12
Et, captive à jamais dans le rhythme inflexible, 12
Elle aspire sans cesse à remonter au ciel. 12
Elle meurt du désir qui toujours la dévore 12
20 Dans la froide prison des mètres et des vers, 12
Et tâche, l'œil perdu parmi les cieux ouverts, 12
D'entendre encor la voix de cet archet sonore 12
Qui, si loin du désert où ses chants vont éclore, 12
Mène dans l'infini le chœur de l'univers. 12
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