Métrique en Ligne
BAN_6/BAN314
Théodore de BANVILLE
ODELETTES
1856
A Alfred Dehodencq
Tenir la lumière asservie 8
Lorsqu'elle voudrait s'envoler, 8
Et voler 3
A Dieu le secret de la vie ; 8
5 Pour les mélanger sur des toiles 8
Dérober même aux cieux vengeurs 8
Leurs rougeurs 3
Et le blanc frisson des étoiles ; 8
Comme on cueille une fleur éclose, 8
10 Ravir à l'Orient en feu 8
Son air bleu 3
Et son ciel flamboyant et rose ; 8
Pétrir de belles créatures, 8
Et sur d'éblouissants amas 8
15 De damas 3
Éparpiller des chevelures ; 8
Inonder de sang le Calvaire 8
Ou jeter un éclat divin 8
Sur le vin 3
20 Qu'un buveur a mis dans son verre ; 8
Se réjouir des pierreries, 8
Et jeter le baiser vermeil 8
Du soleil 3
Jusque sur les rouges tueries ; 8
25 Créer des êtres, et leur dire : 8
Misérables, c'est votre tour ! 8
Que l'Amour 3
De sa folle main vous déchire ; 8
Enfin pour ce monde risible 8
30 Forçant la couleur à chanter, 8
L'enchanter 3
Par une musique visible, 8
Voilà vraiment ce que vous faites, 8
Peintres ! qui pour nous préparez 8
35 Et parez 3
Sans repos d'éternelles fêtes ! 8
Ouvriers, inventeurs, génies ! 8
Par un miracle surhumain, 8
Votre main 3
40 Réalise ces harmonies 8
Où la couleur qui se déploie 8
En accords de la nuit vainqueurs, 8
Dans nos cœurs 3
Fait jaillir des sources de joie. 8
45 Et nos fronts sont baignés d'aurore. 8
Mais vous, par un retour fatal, 8
L'Idéal 3
Vous martyrise et vous dévore. 8
Et vos enchantements sublimes, 8
50 Vous les payez de votre chair ; 8
Il est cher, 3
Le feu qu'on vole sur les cimes ! 8
Si tu montas avec délice 8
L'escalier bleu des paradis 8
55 Interdits, 3
Un inexprimable supplice 8
Te punit, ô rêveur étrange 8
Qui sus donner l'illusion 8
Du rayon 3
60 De lumière où s'envole un Ange ; 8
Et lorsque tout le ciel flamboie 8
Dans ta prunelle ivre d'amour, 8
Un vautour 3
Vient manger ton cœur et ton foie. 8
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