Métrique en Ligne
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Théodore de BANVILLE
NOUS TOUS
1883-1884
LXXXVI
Le Bassin
Au Luxembourg, que je dis 7
Beau comme le paradis, 7
On a torturé les lignes 7
Et le fantasque dessin 7
5 D'un capricieux bassin, 7
Pour les canards et les cygnes. 7
Les bleus canards du Japon 7
Semblent sortis d'un crépon, 7
Et forment un long cortège 7
10 A l'entour des cygnes blancs, 7
Dont les ailes et les flancs 7
Sont pareils à de la neige. 7
Tout au beau milieu des eaux, 7
Une île offre à ces oiseaux 7
15 Le gazon vert. Leur royaume 7
Est fort exigu. Mais on 7
Leur a fait une maison 7
Basse, avec un toit de chaume. 7
En leurs infinis loisirs, 7
20 Ils savourent les plaisirs 7
Que l'oisiveté ménage ; 7
Et philosophes par goût, 7
Les uns ne font rien du tout, 7
Pendant que le reste nage. 7
25 Mais dans l'île, sur le bord 7
Que l'eau caressante mord 7
Et parmi les folles branches, 7
Parfois, d'un mouvement fou, 7
Les cygnes lèvent leur cou 7
30 Puis ouvrent leurs ailes blanches. 7
Les grands cygnes fabuleux 7
Et les petits canards bleus 7
Respirent dans la nature 7
Et, leur sens étant profond, 7
35 Ces êtres ailés ne font 7
Jamais de littérature. 7
C'est la joie, argent comptant. 7
Certes, je serais content 7
Si de tels bonheurs insignes 7
40 M'étaient seulement promis, 7
O vous, canards, mes amis, 7
Et vous, mes confrères, cygnes ! 7
6 mars 1884.
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