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Théodore de BANVILLE
NOUS TOUS
1883-1884
LXIII
A l'Hiver
Hiver bizarre, hiver tiède, 7
Par un vent chaud souffleté, 7
Faux printemps de Samoyède, 7
Es-tu l'hiver, ou l'été ? 7
5 Voyons, faut-il qu'on s'habille 7
De mousseline, ou de vair ? 7
Parle. Explique-toi. Babille. 7
Je veux bien. Es-tu l'hiver ? 7
Bon. Alors, fournis la glace 7
10 Où, sous leurs riants satins, 7
Les princesses que Worth lace 7
Courront avec des patins ! 7
Apporte la blanche neige 7
Où, sous le ciel éclairci, 7
15 Défilera le cortège 7
Des dames, blanches aussi ! 7
Donne un sérieux indice. 7
Te plaît-il d'être l'été ? 7
Que la Seine resplendisse 7
20 Comme le Guadalété ! 7
Dans les clairières ouvertes, 7
Donne aux arbres les frissons 7
Des tremblantes feuilles vertes, 7
Et qu'ils soient pleins de chansons ! 7
25 Apporte des tas de roses, 7
Et que Lise au front charmant 7
Dans les forêts grandioses 7
Folâtre avec son amant ! 7
Déballe ta marchandise. 7
30 Mais jusqu'à présent, mon cher, 7
Il faut que je te le dise, 7
Tu n'es ni poisson, ni chair. 7
J'ignore si Turlurette 7
Doit prendre son éventail 7
35 Ou garder sa chaufferette. 7
Un hiver épouvantail, 7
Un hiver cruel, absurde, 7
A la fois borgne et manchot, 7
Un hiver chinois ou kurde, 7
40 Soufflant le froid et le chaud, 7
Avec un vent qui nous fouette 7
Ainsi que des Esclavons 7
Ou comme une girouette, 7
Voilà ce que nous avons ! 7
12 février 1884.
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