Métrique en Ligne
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Théodore de BANVILLE
NOUS TOUS
1883-1884
XIII
Les Jeunes
Beaucoup de jeunes assassins 8
Couvant le meurtre dans leurs seins, 8
Charment de leur front taciturne 8
Le ciel nocturne. 4
5 Ils se traînent le long d'un mur. 8
La lune qui luit dans l'azur 8
Argente, plus verte que l'herbe, 8
Leur joue imberbe. 4
Ici Polyte encore enfant, 8
10 A l'air candide et triomphant, 8
Terrasse une vieille et la vole, 8
Et puis s'envole. 4
Plus loin, c'est le petit Loulou 8
Déjà meurtrier et filou, 8
15 Qui, rose avec un œil qui brille, 8
Semble une fille. 4
Chérubin triste au poil naissant, 8
Il se jette sur un passant 8
Dont l'habit cossu le renseigne, 8
20 Et vous le saigne. 4
Et puis, dans un bouge rieur 8
Du boulevard extérieur 8
Il s'en va, pâle encor du drame, 8
Trouver sa femme. 4
25 Joyeux, il la saisit aux flancs 8
Avec ses doigts encor sanglants, 8
Et baise sa joue éraillée 8
Et maquillée. 4
Et tous les deux, le front pesant, 8
30 Ils boivent, en s'entre-baisant, 8
Une eau-de-vie épouvantable 8
Qui les accable. 4
Et Loulou murmure tout bas : 8
Cache cet or dans ton vieux bas. 8
35 J'ai fait une bonne rencontre ; 8
Tiens, vois la montre ! 4
J'ai mes dix-sept ans révolus : 8
Donc l'atelier, il n'en faut plus. 8
Assez de travail et de jeûnes. 8
40 Quoi ! place aux jeunes ! 4
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