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Théodore de BANVILLE
DANS LA FOURNAISE
Dernières Poésies
1892
La Promenade
Oui, nous dit le pâle Ramon, 8
Dont la tristesse fut touchante, 8
Même ici, je regrette mon 8
Pays, où la lumière chante. 8
5 Chaque Parisienne, au Bois, 8
Reluit comme une friandise 8
Et nous met le cœur aux abois ; 8
Mais, permettez que je le dise, 8
Rien n'est plus splendide et vermeil 8
10 Que l'Alameda de Grenade, 8
A l'heure fauve où le soleil 8
Teint de ses feux la promenade. 8
Les myrtes et les blancs jasmins, 8
Groupés en corbeilles hautaines, 8
15 Embaument tout l'air des chemins, 8
Où se lamentent les fontaines. 8
Le zéphyr frissonne, subtil, 8
Dans le feuillage de chaque arbre, 8
Et le beau fleuve, le Genil, 8
20 Arrive dans son lit de marbre. 8
Il descend vers l'Alameda ; 8
Son flot, sur les monts grandioses, 8
Vient de la sierra Nevada 8
Dont les escarpements sont roses. 8
25 L'œillet rouge sur le chignon, 8
Le front riant sous leurs mantilles, 8
Passent, d'un pas leste et mignon, 8
Les dames et les jeunes filles. 8
On voit briller leurs dents d'émail, 8
30 Et leur main folâtre, qui joue, 8
Fait caresser par l'éventail 8
Les pâles roses de leur joue. 8
Que de fières beautés sont là ! 8
Gracia dont le front se dore, 8
35 Dolorès, Teresa, Gala, 8
Martirio que tout adore ; 8
Carmen, dont le vent querelleur 8
Baise en riant la blancheur mate. 8
Et Juana dont la bouche en fleur 8
40 Est une grenade écarlate ! 8
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