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Théodore de BANVILLE
DANS LA FOURNAISE
Dernières Poésies
1892
Salve !
Un chariot t'emporte, à l'heure où l'aube naît. 12
Cochon vorace en qui l'homme se reconnaît, 12
Cochon rose, à travers Paris qui vient d'éclore, 12
Sous les premiers rayons frissonnants de l'aurore, 12
5 Splendide orfèvrerie où brille un cabochon, 12
Pauvre être que baisait la lumière, Cochon, 12
Tu vas, mal secouru par ton pauvre génie, 12
Mourir sous le couteau comme une Iphigénie, 12
Et quand tu tomberas sous le coup meurtrier, 12
10 On mettra sur ta tête affreuse un noir laurier. 12
Hier pourtant, ignorant encor la peine dure, 12
Tu te vautrais dans les délices de l'ordure, 12
Heureux, sordide, en proie à tes vils appétits, 12
Auprès de ta femelle et de tous ses petits. 12
15 O Cochon monstrueux, goulu, pareil à l'homme, 12
Tu semblais dans ta fange un empereur de Rome ; 12
Alors, taché de rose, éblouissant, vermeil, 12
On eût dit que sous les caresses du soleil 12
Tu marchais dans les ors fous des apothéoses, 12
20 Et qu'il pleuvait sur toi de la flamme et des roses. 12
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