Métrique en Ligne
BAN_16/BAN653
Théodore de BANVILLE
SONNAILLES ET CLOCHETTES
1888
XX
Lune
Comme aux Cieux elle étincela, 8
Je la contemplai d'un œil mâle, 8
Et la Lune me fit de la 8
Peine, tant je la voyais pâle. 8
5 Elle souffrait, j'en étais sûr, 8
Et sa face, comme assoupie, 8
Ressemblait à ce papier sur 8
Lequel on fait de la copie. 8
Au haut des célestes pourpris, 8
10 Avec ses pâleurs d'avalanche 8
Et de houppe à poudre de riz, 8
Elle était très blanche, oh ! si blanche ! 8
J'en sentais un trouble à mon flanc. 8
Voyant cela, je lui dis : Lune, 8
15 Quel est ce visage si blanc ? 8
Car enfin, de deux choses l'une, 8
Ou tu défailles ou tu meurs, 8
L'âme épuisée et comme antique, 8
Ou bien c'est, pour plaire aux rimeurs, 8
20 Un déguisement romantique. 8
En tout cas, astre, hélas ! transi 8
Devant le nuage qui bouge, 8
Par décence, au lieu d'être ainsi, 8
Tu devrais mettre un peu de rouge ! 8
25 Mais la Lune aux lèvres d'argent 8
Me dit, sans être intimidée, 8
Avec un sourire engageant : 8
Du rouge ! Eh ! oui, c'est une idée, 8
Et l'on en met à Singapour. 8
30 Moi j'aime peu qu'on me diffame, 8
Et je me ferais passer pour 8
Être aussi folle qu'une femme ! 8
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