Métrique en Ligne
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Théodore de BANVILLE
SONNAILLES ET CLOCHETTES
1888
XII
Le Piano
Tant pis, j'aime le piano ! 8
Mon maître, au fond de la Scythie 8
Fort connu, comme à Landerneau, 8
Aimait l'araignée et l'ortie. 8
5 Et pourquoi ? Parce qu'on les hait. 8
Pour moi, j'aime, épris de chimères, 8
Le piano, parce qu'il est 8
Plus haï que les belles-mères. 8
Un rayon sur mon front a lui, 8
10 Lorsque l'heure du thé ramène 8
Ce monstre, affreux comme celui 8
Du long récit de Théramène. 8
Devant les dames à turban, 8
A ses vœux j'aime à condescendre, 8
15 Quand sa croupe se recourbe en 8
Replis de bois de palissandre. 8
N'ayant pas tremblé pour si peu, 8
Je supporte ses airs farouches 8
Et même, le terrible jeu 8
20 De ses dents, qu'on nomme : des touches. 8
Eh ! oui, le piano, Meyer 8
Beer admettait cet ustensile, 8
Et c'est pourquoi Ernest Reyer 8
Me semble un peu trop difficile. 8
25 Implorant les cieux parfois sourds 8
Où passent des guerriers équestres, 8
J'en conviens, je n'ai pas toujours 8
Sous ma main de puissants orchestres. 8
Or, pour oublier les méchants 8
30 Si, pâle et l'œil de pleurs humide, 8
J'ai besoin d'entendre les chants 8
Célestes d'Orphée ou d'Armide, 8
O Vérité, sors de ton puits ! 8
Lorsque ce désir fou m'étrangle, 8
35 Dis-nous cependant si je puis 8
Me les jouer sur le triangle ! 8
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