Métrique en Ligne
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Théodore de BANVILLE
IDYLLES PRUSSIENNES
1871
Le Docteur
Sous les vieilles solives noires 8
Où, racontant leur fabliau, 8
Leurs légendes et leurs histoires, 8
Bruissent les in-folio, 8
5 En pleine vie imaginaire, 8
A côté de son chat câlin, 8
Le docteur septuagénaire 8
Aglaüs Evig, à Berlin, 8
Parle à ses tisons de la sorte, 8
10 En tourmentant ses favoris 8
D'une blancheur livide et morte : 8
Lorsque nous aurons pris Paris, 8
Dit-il, c'est nous, dont l'esprit veille 8
En dépit des pharisiens, 8
15 Nous, les Prussiens, ô merveille ! 8
Qui serons les Parisiens. 8
Nous pourrons dans nos coupes vertes 8
Boire sentimentalement 8
Le vin de Champagne, qui, certes, 8
20 Sera du Champagne allemand. 8
Nous écrirons pour les théâtres 8
Des pamphlets gais et querelleurs ; 8
Nous serons légers et folâtres 8
Comme l'abeille sur les fleurs. 8
25 A tout propos, nous saurons dire, 8
D'un ton malicieux et fin, 8
Des contes à mourir de rire ; 8
Nous aurons le mot de la fin. 8
Nous fumerons des cigarettes 8
30 Et, mettant le beau monde à sac, 8
Nous aurons tous des amourettes 8
A la manière de Fronsac ! 8
Ainsi fleurira le poëme 8
Depuis longtemps par nous rêvé ; 8
35 Et moi-même, Aglaüs, moi-même 8
J'aurai l'air d'un petit crevé ! 8
A ces mots, s'étirant pour cause, 8
Et d'un air de puissant mépris 8
Bâillant, tirant sa langue rose, 8
40 Le chat dit : — Paris n'est pas pris, 8
Docteur, je ne sais s'il doit l'être : 8
Mais à jamais, fatalement, 8
C'est notre destin, mon cher maître, 8
De ne miauler qu'en allemand. 8
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